•  Global Voices Online 18/03/2013

    L’assassinat de Parveen Rehman, l’« ange gardien » d’un bidonville de Karachi

    Global Voices"
    Qurratulain Zaman · Traduit par Suzanne Lehn
     

    Parveen Rehman (DR)

    Parveen Rehman, une travailleuse sociale de premier plan au Pakistan, a été abattue par des tireurs non identifiés au milieu d’une escalade de violence ethnique, religieuse et criminelle dans la métropole de Karachi.

    Parveen Rehman, 56 ans, a été tuée le 13 mars 2013 aux portes d’Orangi, où elle dirigeait le Orangi Pilot Project (OPP), une des ONG les plus efficaces du Pakistan, au service des déshérités.

    Orangi, considéré comme le plus grand bidonville d’Asie, abrite près d’un million d’habitants à Karachi. Architecte diplômée, Parveen travaillait aussi inlassablement à documenter chaque parcelle du bidonville tentaculaire et de la ville, pour préserver les terrains de la mafia du foncier bien connue de Karachi, dont elle recevait des menaces de mort depuis des années.

    Sur son blog Alexressed Journal d’un Pakistanais préoccupé, Ale Natiq écrit :

    « La plupart la connaissent comme la directrice du Orangi Pilot Project (OPP) mais elle était plus qu’une simple directrice d’ONG. Elle et son organisation ont laissé des empreintes sur une grande partie de Karachi et ont influé sur des milliers de vies.

    On peut dire sans exagérer qu’elle a influé d’une façon ou d’une autre sur les vies d’un demi-million de personnes ou la moitié de la population d’Orangi. Les taudis de Karachi et les katchi abadis ont perdu une figure maternelle. »

    Parmi d’autres événements marquants, l’OPP est renommé pour avoir initié un des programmes d’assainissement d’initiative locale les plus efficaces du monde.

    Depuis ses débuts en 1980, il a aidé 2 millions de personnes à améliorer leur assainissement en installant le tout-à-l’égout et des toilettes d’intérieur dans tout le Pakistan.

    Steve Inskeep, animateur de l’édition matinale de la NPR et auteur de Instant City Life and Death in Karachi (Vie et mort instantanée à Karachi), qui présente un entretien avec Parveen, se souvient sur Twitter :

    @NPRInskeep : « Les étrangers étaient un peu nerveux rien qu’à se rendre à Orangi, l’immense zone de Karachi infestée par les gangs où Rahman travaillait avec entrain tous les jours. »

    Violence de Karachi

    Le même jour que Parveen, sept autres personnes ont été tuées dans divers faits de violence dans la ville. Les utilisateurs de Twitter du Pakistan ont éprouvé un extrême sentiment de perte et de chagrin.

    Le Directeur pour le Pakistan de Human Rights Watch Ali Dayan Hasan a tweeté le 14 mars 2013 :

    @AliDayan (Ali Dayan Hasan) : « Lentement mais sûrement, les meilleurs et tout ce qu’il y a de bon dans notre pays se font cibler et tuer.

    Un sentiment auquel d’autres ont fait écho, tels les journalistes Beena Sarwar, Mohammad Hanif et l’éditorialiste Cyril Almeida :

    @beenasarwar (beena sarwar) : #ParveenRehman RT @mohammedhanif : ‘voilà le plus triste. Et nous qui pensions avoir vu trop de tristesse. Cela n’arrive même plus à soulever la colère.’

    @cyalm (cyril almeida) : ‘Une pensée égoïste ce soir : suis malade à l’dée du nombre croissant de gens dans mon répertoire téléphonique qui ont été fauchés. Trop de morts.’

    @BhopalHouse (Faiza S Khan) : ‘Je me rends compte, je sais depuis quelque temps qu’il n’y a pas de fond où le Pakistan ne s’enfoncera pas. Reconnaissant de me sentir encore le coeur brisé. Bientôt ça aussi sera fini.’

    @AmSayeed (Amima Sayeed) : ‘la propagande négative contre les ONG a conduit à ça : #ParveenRehman tuée par balles. La haine aveugle qui ne voit pas leur apport ! !’


    Hommage à Parveen Rehman (Ayuib. Copyright Demotix, 14/3/2013)

    Parveen luttait contre la mafia du foncier de Karachi

    Avant de rejoindre l’OPP en 1982, Parveen travaillait comme architecte. Elle continuait depuis à enseigner dans différentes écoles d’architecture pour former des architectes socialement responsables dans le pays.

    Parveen a passé des années à faire des relevés de terrains sur les franges de la métropole de Karachi en constante expansion. Selon ses étudiants et collègues elles recevait des menaces de mort de la mafia impliquée dans l’accaparement de terrains urbains précieux :

    ‘Mme Rehman compilait avec ardeur les archives de terrains de valeur, situés aux franges de la ville sous forme de villages mais en voie d’engloutissement rapide dans ses étendues à cause de la demande toujours croissante de milliers de familles migrant chaque année à Karachi depuis tout le pays.

    Elle disait publiquement que quelque 1.500 goths (villages) avaient été fusionnés à la ville depuis 15 ans. Les accapareurs de terrains les divisaient en parcelles et gagnaient des milliards avec leur vente.’

    Le journaliste Fahad Desmukh a tweeté son entretien audio avec Parveen Rehman, où elle évoque les menaces de la mafia du foncier à Karachi :

    @desmukh (Fahad Desmukh) : ‘Parveen Rehman : Nous avons dit : Tout ce que vous pouvez faire c’est nous tuer. Que pouvez-vous faire d’autre ? Nous n’avons pas peur de vous’.

    L’artiste pakistanaise SesapZai écrit sur son blog :

    ‘J’ai presque l’impression que les gens au Pakistan ne veulent pas se développer ; le développement est un monstre qui rôde et devient une énorme menace dès que quelqu’un essaie de le faire avancer.

    Et plutôt que de soutenir et encourager ces courageux humanitaires, comme Parveen Rehman, qui ont consacré et mis en jeu leur vie pour aider les plus pauvres de la région à vivre de meilleures vies, on les assassine. Et avec eux, tous les espoirs et rêves d’un avenir meilleur, plus auto-suffisant économiquement, s’évanouissent également.’


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