Pourquoi cette étude : L’évaluation des risques pour la santé de mélanges de substances chimiques a été éludée jusqu’ici faute d’une méthode appropriée. Or chacun d’entre nous, quel que soit son âge, est exposé journellement à des dizaines de substances chimiques de synthèse dont on ignore les toxicités en mélange . Générations Futures et Antidote Europe se sont donc associés pour s’attaquer à ce problème urgent. Les deux associations ont demandé à une équipe universitaire réputée de tester les activités de mélanges de trois fongicides fréquents (pyrimethanil, cyprodinil et fludioxonil) sur des cellules gliales et neuronales représentatives du système nerveux central humain. Les résultats de ces travaux scientifiques viennent d’être publiés sous le titre : A preliminary investigation into the impact of a pesticide combination on human neuronal and glial cell lines in vitro, M.D. Coleman & al., PLoS ONE* (2012)
http://www.plosone.org/article/info%3Adoi%2F10.1371%2Fjournal.pone.0042768.
Résultats : En combinaison, ces fongicides exercent sur les cellules gliales d’énormes stress oxydants les obligeant à stimuler considérablement l’expression de peroxydases (très peu stimulés par les fongicides seuls) et surtout d’enzymes de neutralisation des radicaux oxygène (effet comparable à celui du cyprodinil).
Sous l’effet du mélange, mais pas des fongicides seuls (sauf le cyprodinil), ces cellules entrent en apoptose (suicide cellulaire)
Les cellules neuronales sont également affectées par le mélange des fongicides, principalement en stimulant l’expression de peroxydases (pas ou peu stimulés par les fongicides seuls), des enzymes de neutralisation des radicaux oxygène (pas affectés par les fongicides seuls sauf le cyprodinil) et une très forte mobilisation des gènes signalant l’entrée en apoptose (peu affectés par les fongicides seuls sauf le cyprodinil)
Rappelons que le stress oxydant joue un rôle important dans la maladie d’Alzheimer, qui se caractérise aussi, comme la maladie de Parkinson, par une atrophie corticale, deux des effets observés massivement avec ces mélanges de fongicides. Les responsables de l’étude confirment que les résultats sont préoccupants.
« Ce travail montre que certains pesticides, isolément ou en combinaisons, peuvent induire du stress et des modifications du devenir des cellules humaines. Ils peuvent aussi interférer avec des processus cellulaires basiques comme celui de la production d’énergie. Ces effets ont été mis en évidence à des concentrations proches de celles trouvées dans nos aliments. Ce travail suggère que nous devrions faire davantage d’efforts pour restreindre l’utilisation des pesticides dans les cultures destinées à l’alimentation,..» Déclare le Professeur Michael Coleman, responsable de l’étude.
« Les résultats de cette étude sur une combinaison de trois résidus de pesticides que nous avions trouvés sur une même grappe de raisin en 2008, montrent que l’évaluation du risque ne rend pas compte d’éventuels effets de synergie entre pesticides, ce qui peut conduire à une sous-estimation grave du risque pour l’homme et l’environnement. Nous demandons à l’ANSES et à l’EFSA de mener d’urgence les recherches qui s’imposent dans ce domaine et, dans l’attente de résultats exhaustifs, d’abaisser significativement les limites maximales en résidus tolérées dans les aliments, dans un soucis élémentaire de précaution. » Déclare François Veillerette, porte-parole de Générations Futures. Les méthodes à cette fin sont à disposition, affirme Claude Reiss, président d’Antidote Europe.
*) PLoS ONE (Public Library of Science) est une revue internationale de haut niveau dont les articles sont soumis à une évaluation rigoureuse par des experts.
Contact presse : F Veillerette 06 81 64 65 58
-
2011 132 p. 19,25€
Trafics de drogues et d’êtres humains, contrebandes, contrefaçons, fraudes financières, crimes
écologiques, guérillas reconverties dans le narco-trafic, corruptions… Dans un monde instable,
comment lutter efficacement contre les nouvelles criminalités organisées qui se jouent des
frontières et profitent de la mondialisation pour se développer ? Comment prévenir et réprimer ces
fléaux qui menacent la sécurité des Etats ?
François Farcy et Jean-François Gayraud montrent pourquoi et comment le renseignement peut
s’avérer utile pour, sinon déraciner, du moins combattre plus efficacement cette criminalité
protéiforme et de plus en plus transnationale. Une nouvelle approche qui exige une remise en
cause radicale des vieilles analyses stratégiques qui stérilisent l’action. Le renseignement criminel
doit en effet s’appuyer sur une vision : l’anticipation, et sur une méthodologie qui articule les
métiers de la recherche et de l’analyse au plan stratégique (art des rapports de force) et tactique
(art des moyens).
Une étude novatrice qui dresse un état des lieux inquiétant, mais aussi l’exploration de nouveaux
remèdes.Docteur en droit, le commissaire François Gayraud est l’auteur de plusieurs ouvrages sur la police
et les mafias.
François Farcy est Commissaire divisionnaire de la Police fédérale belge.
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Contrôle fiscal, les riches peuvent dormir tranquilles
Lundi 20 Août 2012 Laurent KaplanSur le papier, le fisc français dispose de moyens efficaces de surveillance des contribuables les plus aisés. Dans la réalité, l'administration brille surtout par son inefficacité.
Le 127, rue de Saussure, cette adresse parisienne, à deux pas des Batignolles, est peu connue du commun des contribuables. Le bâtiment, aussi gris que discret. Pourtant, c'est dans cet immeuble du XVIIe arrondissement de Paris que sont épluchées les déclarations fiscales des plus grosses fortunes de France. Liliane Bettencourt, François-Marie Banier, Johnny Hallyday ou encore Florent Pagny y disposent d'une chemise libellée à leur nom. Ceux qui y ont croisé Gérard Depardieu ou Jean Dujardin pourront vous le dire : ce n'est pas du cinéma. Ou alors un mauvais film fiscal.
Car, ici, on vérifie. Créée en 1983, la Direction nationale des vérifications de situations fiscales (DNVSF) a pour vocation de contrôler les citoyens les plus riches et les plus connus. «A l'époque, explique l'un de ses 250 agents, il y a eu une volonté d'ouvrir un service spécialisé afin de réaliser des examens très particuliers. La France s'est alors dotée d'un arsenal unique en Europe, mais ces pouvoirs restent surtout théoriques.»
Dans son rapport annuel 2012, publié en février, la Cour des comptes ne disait pas autre chose. Selon elle, «la DNVSF présente des résultats décevants et n'est pas en situation d'exercer un contrôle efficace des contribuables les plus fortunés». La haute juridiction pointait même «une baisse du rendement du contrôle, après une forte croissance au début des années 2000». En 2000, le prestigieux service a ainsi «rappelé» un montant d'impôts et de pénalités de 320 millions d'euros. Un magot qui a explosé à quelque 500 millions entre 2002 et 2004, pour revenir à un peu plus de 300 millions en 2010. «La diminution des montants recouvrés contraste avec la hausse des patrimoines et des revenus financiers les plus élevés», notait la haute cour, tout en reconnaissant que «des comportements d'optimisation non frauduleux peuvent expliquer cette divergence». Informations parcellaires, absence d'historique des dossiers, agents inexpérimentés et insuffisamment spécialisés, manque de coordination avec les autres directions..., à l'heure de l'addition, les sages de la Rue Cambon ont eu la main lourde. Consciente de ses insuffisances, la DNVSF a d'ailleurs engagé une large réorganisation en 2011. A la décharge de celle-là, la Cour des comptes évoque «le caractère plus mouvant et plus complexe de la fraude», qui s'est «dématérialisée, internationalisée, accélérée».
Un effort insuffisantDans son combat, la DNVSF dispose d'une arme redoutable : l'ESFP. Quatre lettres pour désigner l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle. Il offre aux vérificateurs un pouvoir coercitif considérable qui, ailleurs en Europe, nécessite l'autorisation d'un juge. Objectif : contrôler la cohérence entre les revenus déclarés par un contribuable et son patrimoine, sa trésorerie et son train de vie. La DNVSF peut elle-même se saisir d'un dossier qui lui paraît équivoque. Si un sportif de haut niveau lui annonce qu'il va s'établir à Gstaad, coquette station helvétique, libre à elle d'enquêter pour vérifier si l'heureux exilé a réellement son rond de serviette au pied des pistes alpines. Les cent quatre-vingt-trois jours de résidence avérée sur place sont «un mythe», s'amuse le vérificateur, «le plus important, avant même le séjour, c'est le foyer». Autrement dit, si ses enfants sont scolarisés à Paris et qu'il a réglé Porsche et hélico dans l'Hexagone, ses six mois de résidence en Suisse ne feront pas le poids.
De même, si la DNVSF s'avise qu'un contribuable ne déclare que 50 000 € alors qu'il pilote une kyrielle d'entreprises et réside dans un château en province, elle a tout loisir d'enquêter pour déterminer s'il perçoit des revenus occultes ou vit, à coups d'abus de biens sociaux, sur le dos de ses sociétés. Mais le principal pourvoyeur d'affaires reste la Direction nationale des enquêtes fiscales (Dnef). Chaque année, la DNVSF instruit plusieurs centaines de dossiers. Insuffisant, juge pourtant la Cour des comptes, qui déplore des contrôles «limités». Selon ses calculs, «la probabilité pour un contribuable fortuné d'être contrôlé en ESFP est d'une fois tous les quarante ans».
L'ESFP, dont la durée, sauf exceptions, ne peut excéder un an, se déroule en deux temps : le vérificateur effectue d'abord un contrôle sur pièces. Puis il envoie un avis au contribuable afin de le rencontrer pour l'interroger sur certaines anomalies. Dans son costume de modeste fonctionnaire des impôts, il acquiert alors des pouvoirs de superhéros et peut exiger du millionnaire qu'il lui remette ses relevés de comptes. Si l'intéressé résiste, la DNVSF peut interroger directement les banques. Et si l'encaissement d'un chèque de 50 000 e la chagrine, elle peut même en réclamer la photocopie pour vérifier l'émetteur.
Les résidents fiscaux français sont obligés de fournir la liste de leurs comptes bancaires à l'étranger. Une dissimulation est sanctionnée par une amende de 1 500 e par compte non déclaré, amende qui passe à 10 000 e si le compte a été ouvert dans un paradis fiscal avec lequel la France n'a signé aucune convention. Face à un refus d'obtempérer, le vérificateur peut lancer une demande d'assistance administrative aux pays coopératifs, régis par des conventions fiscales.
Si ces pouvoirs paraissent énormes sur le papier, dans la réalité, les nantis ont pourtant mille façons de contourner l'ESFP, murmure-t-on Rue de Saussure. En première ligne, les paradis fiscaux qui, malgré les déclarations enthousiastes de Nicolas Sarkozy en 2008, sont loin d'avoir disparu. Ainsi de la Suisse, témoigne notre vérificateur, «où, en dépit de la signature de conventions, les autorités fiscales rechignent toujours à fournir les noms des titulaires des comptes bancaires».Le rôle des conseilsParfois, pourtant, la chance sourit aux vérificateurs. Ainsi l'un d'entre eux est parvenu à coincer un entrepreneur qui prétendait que sa société était domiciliée aux Bermudes. En traçant des dizaines de milliers de mails émanant de Toulon, où il résidait, il a réussi à prouver que le siège effectif de sa société était bien en France et les 123 petites îles de corail, une simple boîte aux lettres.
Par ailleurs, regrette la juridiction présidée par le socialiste Didier Migaud, «l'intérêt de l'ESFP a été limité par un certain nombre de règles, dont la règle du double». Un vérificateur ne peut en effet interroger un contribuable de manière contraignante que si les crédits apparaissant sur son compte sont au moins deux fois supérieurs aux revenus déclarés. Autrement dit, s'il a déclaré 2 millions de revenus, on ne pourra l'obliger à se justifier que si son compte affiche plus de 4 millions de rentrées. A 3,8 millions, témoigne l'agent de la DNVSF, «il peut nous dire d'aller nous faire voir». «Cette situation, déplore la Cour des comptes, bénéficie indubitablement aux plus hauts revenus».
Surtout, remarque notre vérificateur, les contribuables sont de plus en plus prudents et de mieux en mieux conseillés. Résultat : «Il y a de moins en moins d'argent un peu gris sur les comptes. Il faudrait vraiment être idiot pour y déposer une grosse somme. Acheter des armes pour l'Angola via des comptes bancaires, ce serait grotesque ! On attrape bien encore quelques petits poissons comme ça, mais c'est rarissime.»
Article publié dans le magazine Marianne n°795, daté du 13 au 20 juillet 2012.
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Ventres creux contre ventres dorés
Dimanche 26 Août 2012 Dominique JametDe Rome au Fouquet's, en passant par le Moyen Age, «Marianne» explore l'histoire de nos rapports tumultueux à l'argent. Troisième épisode de notre série, la France de 1715 à la Révolution. A la mort de Louis XIV, le pays est ruiné, mais les folies des grands ne connaissent toujours pas de limites. Ajoutées aux filouteries des agioteurs et à la rapacité des fermiers généraux, la situation devient explosive. Bientôt, la Révolution viendra décapiter le règne des argentés.
En 1715, la dette publique équivaut à dix années de recettes fiscales. L'Etat, contraint d'emprunter au taux exorbitant de 8 %, a d'ores et déjà englouti par anticipation les rentrées des deux exercices à venir. C'est un pays en banqueroute virtuelle, ruiné par ses fastes et ses guerres, que Louis XIV lègue à son arrière-petit-fils. Dans ce contexte dramatique, le Régent, qui en assume la gestion et l'impopularité qui y est attachée, se laisse séduire par les propositions audacieuses d'un Ecossais aventurier et visionnaire, qui se fait fort de relancer l'activité économique et de renflouer un navire qui mergitur plutôt qu'il ne fluctuat... Bombardé contrôleur général des finances, John Law est autorisé à fonder une société qui acquiert progressivement le monopole du commerce entre la métropole et les Indes occidentales et orientales.
Appâté par une campagne de publicité très en avance sur l'époque, le public se jette sur les actions de cette compagnie, initialement porteuses d'un intérêt de 7 %, réduit par la suite à 5 %, puis 3 %. Le succès est prodigieux, les cours s'envolent, la spéculation se déchaîne. A son maximum, le cours de l'action de 500 livres montera à 20 000 livres ! Parallèlement, la Banque générale est fondée, dont la direction est confiée à Law, qui reçoit le privilège d'émettre une monnaie de papier, garantie par l'Etat, plus commode, plus maniable et réputée aussi sûre que les espèces métalliques. Le «système» de Law repose sur le volume du négoce avec les colonies. Fondée sur une hypothèse de croissance, sa pérennité est liée à la réalité de l'économie, sa crédibilité est fonction de la confiance qu'actionnaires et déposants font à la puissance publique. Or, si les simples particuliers, persuadés de faire une excellente affaire, se laissent bercer et berner par les communiqués optimistes et bientôt mensongers de Law, les gens bien informés ne tardent pas à apprendre que les transactions effectives sont loin de répondre aux espérances connues et aux assurances prodiguées. Quant aux quantités de papier émises par la Banque générale, elles excèdent de loin son encaisse or.Délit d'initié historique
L'époque ignore, et pour cause, la discrétion des virements électroniques. C'est donc en pleine lumière, au grand jour, devant le siège de la banque, rue Quincampoix, sous les yeux de la foule où se mêlent quotidiennement les badauds, les escrocs et les gogos, que viennent stationner, un matin de juillet 1720, cinq carrosses, trois aux armes de Mgr le prince de Conti, deux qui portent le blason de Mgr le duc de Bourbon, et que se perpètre un des plus grands, peut-être le plus grand délit d'initié de notre histoire. Employés de la banque et laquais font le va-et-vient entre le bâtiment et les voitures où ils entassent de lourdes caisses. Le bruit s'en répand comme une traînée de poudre : anticipant la faillite d'un système dont ils précipitent l'effondrement, les deux premiers princes du sang, dont la rapacité n'exclut pas d'inavouables arrière-pensées politiques, après avoir une première fois réalisé de belles plus-values lorsque les actions de la compagnie étaient cotées plus haut que leur valeur nominale, troquent leurs billets de la Sainte-Farce contre leur équivalent en or. Le prince et le duc, physiquement présents sur les lieux de leur hold-up, repartent l'un avec 14 millions en métal précieux, l'autre avec 11 millions, des sommes colossales. Il s'ensuit naturellement une panique générale, un bank run, dirait-on aujourd'hui.
Dans les jours qui suivent, la banque après avoir fait face aux premiers retraits, suspend la convertibilité des billets et ferme ses guichets au nez de ses clients. Law, qui échappe de peu au lynchage, s'enfuit à l'étranger, et son système s'écroule comme un château de cartes. La scandaleuse filouterie des deux plus proches parents du roi (en dehors du Régent lui-même et des bâtards mal légitimés de Louis XIV) est un événement, plus précisément un traumatisme fondateur, qui entraîne des conséquences de deux ordres. D'une part, les 500 000 actionnaires de la Compagnie des Indes et les quelque 2 millions d'usagers du papier-monnaie - les 10 % les plus aisés et les plus évolués de la population -, floués et échaudés, jurent qu'on ne les y reprendra plus. En dépit de la laborieuse mise en place de procédures d'indemnisation qui s'étalent sur des années et n'offrent à leurs bénéficiaires qu'une satisfaction partielle, la compréhensible défiance qui résulte de cette fâcheuse mésaventure retardera de plus d'un siècle l'introduction puis l'acceptation des billets de banque.
Les dégâts ne sont pas moindres sur un autre plan. Ce ne sont pas seulement des économies que les victimes du krach ont laissées dans cet épisode, mais des illusions que dissipe la «volerie» des deux princes-monseigneurs. Le détestable exemple venu de si haut ne sera ni oublié ni pardonné. Cette affaire n'est que la première d'une longue série qui jalonnera le siècle. Les temps ont évolué avec le changement de règne. La chape de plomb que le Grand Roi, (ce «prince ennemi de la fraude», si l'on en croit Molière), ses juges, ses exempts, ses lettres de cachet, son prestige, sa puissance, faisaient peser sur le royaume se fissure de toute part. L'état de la société, l'état des esprits ne sont plus les mêmes. L'obéissance courbait les têtes, l'impertinence les relève. Les bouches étaient cousues, elles s'ouvrent. On était dans la résignation, l'air ambiant est à la rébellion. Que les grands soient des prédateurs, que les ministres soient des voleurs, que la dépravation et ses suites infectent le haut clergé, que les nobles soient des parasites, la chose n'est pas nouvelle.Des ancêtres, un grand train, des maîtresses, des dettesCe qui est nouveau, c'est qu'on le dise, et qu'on s'en indigne. Tout se commente désormais, tout se discute, tout se sait, et ce qu'on ne sait pas, on l'invente. Bientôt, on tombera d'un excès dans l'autre. Il n'est que de comparer le traitement de l'épouvantable affaire des poisons et celui que connaîtra la ridicule affaire du collier de la reine. De la première, qui met en cause les plus grands noms de l'armorial, et jusqu'au très proche entourage du souverain, qui charrie un flot boueux et sanglant de messes noires, d'avortements, d'infanticides, de captations d'héritage, on ne connaîtra que ce que le monarque aura laissé émerger et punir. Cent ans plus tard, l'ingénieuse mais somme toute anodine machination que deux aigrefins auront montée contre un prélat crédule et vaniteux salira, dans un déchaînement de libelles orduriers et calomniateurs, une reine imprudente mais innocente et pèsera d'un poids non négligeable dans le discrédit et la chute de la vieille monarchie. On n'en est pas là, mais le ver est dans le fruit.
Talleyrand, pourri entre les pourris, évoquera, nostalgique, l'incomparable douceur de vivre que n'ont pas connue ceux qui n'ont pas vécu le crépuscule de l'Ancien Régime. Douceur de vivre, sans doute, mais pour qui ? La richesse étale sans vergogne le luxe le plus débridé au nez et à la barbe des plus défavorisés et des plus éclairés. Les privilégiés dissipent sans compter dans la construction d'hôtels magnifiques, dans le jeu, dans les fêtes galantes, un argent bêtement hérité, follement emprunté ou malhonnêtement gagné, que la masse, insensible au charme de leur conversation comme au raffinement de leurs manières, s'exaspère de voir jeter par les fenêtres. Le sentiment général est que la fortune va de pair avec le vice, la débauche, le gaspillage. Qu'est-ce qu'un grand seigneur ? Beaumarchais le résume : des ancêtres, un grand train, des maîtresses, des dettes. Qu'est-ce qu'un fermier général ? Un coquin, une sangsue, un vampire qui, après avoir sucé le sang des pauvres, n'a de cesse de rejoindre la bulle où la bonne société s'étourdit de champagne en écoutant Mozart.
Les fermiers généraux ? Parlons-en. La Ferme - ou faut-il dire la Firme ? - c'est cette honorable compagnie de 40 puis de 60 financiers à qui la monarchie sous-traite à bon prix (et pots-de-vin en sus), par délégation de service public, le recouvrement des impôts indirects - taxes sur le sel, l'alcool, le tabac, octroi de Paris -, soit 40 % du budget de l'Etat. Aux fermiers de verser chaque année au Trésor la somme forfaitaire fixée par l'administration et de se la procurer ensuite par l'intermédiaire de 25 000 agents qui, chargés de la perception et de la répression, envoient chaque année 4 000 contrevenants en prison et quelques centaines de contrebandiers aux galères.Les fermiers prêtent au roiRémunérés au forfait, les fermiers se paient une seconde fois sur la différence, à leur avantage, entre impôt prévu et impôt perçu. Les plus connus de ces personnages ont nom Crozat, La Popelinière, Grimod de La Reynière, les frères Pâris, Lavoisier... Certains ne dédaignent pas de donner un petit coup de pouce à leurs revenus en mouillant le tabac, ce qui en altère la qualité mais en augmente la quantité. Leur popularité ne s'accroît pas lorsque, dans l'intention de mettre un terme à toute déperdition, ils ceignent Paris d'une muraille continue, embellie il est vrai des barrières de Ledoux, aujourd'hui presque toutes disparues. Pas chiens, les fermiers prêtent au roi, toujours impécunieux. Pour fixer les idées, un ouvrier bien payé gagne environ 700 livres par an, Lavoisier, à peu près 200 000... Appelé au secours par une monarchie aux abois, Necker croit bien faire et frappe en tout cas un grand coup lorsque, en 1781, sous le titre sobre de «Compte rendu», il rend public le budget de la France, jusqu'alors rigoureusement tenu secret. C'est un énorme succès de librairie (qui ne génère pas de droits d'auteur) : 100 000 exemplaires vendus. Le ministre des Finances, suisse et honnête, entend restaurer la confiance en jouant la transparence.
Ainsi les Français découvrent-ils qu'en regard de 504 millions de recettes, le chiffre des dépenses se monte à plus de 600 millions de livres, dont 300 millions pour le seul service de la dette. Il est vrai que, sur les quatre années précédentes, il a fallu emprunter 500 millions pour soutenir les insurgents américains. Si l'on fait abstraction du coût de la guerre, avance Necker, on se retrouve à l'équilibre, et même avec un léger excédent. Evidemment... En fait, tout ce que l'opinion, ainsi prise à témoin, retient du «Compte rendu», ce sont le montant, les attributaires et les motifs des pensions versées sur la cassette du roi, aux frais de la princesse : 5 % seulement du budget, mais qui ne passent pas. Trop de rancoeur, trop de haines se sont accumulées, de génération en génération, contre les privilégiés. Les ventres creux, qui demain seront les sans-culottes, ne font ni dans la nuance, ni dans la dentelle, et confondent dans la même détestation les «ventres dorés», les gilets à fleurs et les robes à paniers. «Quand les peuples cessent d'estimer, ils cessent d'obéir», écrira Rivarol, écrivain réactionnaire mais esprit lucide.
La Révolution, c'est la rencontre entre une banqueroute morale et financière et une révolte morale et sociale. Tous les adversaires de la Révolution n'étaient pas riches, et tous les riches n'étaient pas ennemis de la Révolution, mais c'est la richesse elle-même qui paraît incompatible avec l'explosion d'une revendication nouvelle et dès lors ancrée dans le caractère français : la passion de l'égalité. L'idée est alors communément répandue qu'il faut faire rendre gorge aux nantis, niveler les conditions, fût-ce en mettant quelques entraves à la liberté, faire régner la vertu, fût-ce par la terreur, éradiquer les classes dominantes par tous les moyens, de la confiscation à la guillotine, en passant par les nationalisations.«Vols et brigandages»
La Ferme est abolie le 20 mars 1791. Jacques Hébert, alias «le père Duchesne», s'en réjouit dans son style si particulier : «Quelle grimace feront tous ces jean-foutre ! Adieu les beaux palais, adieu ces jolies maisons de campagne, adieu ces riches ameublements... Ces jean-foutre-là vont sans doute imiter les autres aristocrates et emporter chez l'étranger toutes nos dépouilles. J'invite tous les citoyens à se réunir dans leurs sections et à leur faire regorger tout ce qu'ils ont acquis par des vols et des brigandages.» En novembre 1793, 34 anciens fermiers généraux qui ont eu la sottise de rester en France sont arrêtés. Modérément républicain, ce qui, à l'époque, est un crime, mais sincèrement ami des idées nouvelles, Lavoisier se constitue prisonnier. «Mille millions de tonnerres, s'écrie le père Duchesne dans un de ses habituels accès de mélenchonie, les voilà terrassés, ces fermiers généraux qui s'enrichissaient de la misère du pauvre peuple !» Terrassés en effet : ils sont 28, le 8 mai 1794, à monter sur l'échafaud. Lavoisier a vainement sollicité un sursis de quinze jours, pour terminer une importante expérience en cours. La République n'a pas besoin de financiers, fussent-ils savants. «Il n'a fallu qu'un moment pour faire tomber cette tête, déclarera, un an plus tard, un de ses collègues de l'Académie des sciences, et cent ans peut-être ne suffiront pas pour en reproduire une semblable.»
Le printemps et le début de l'été 1794 marquent l'apogée de ce que l'on a appelé la Grande Terreur, caractérisée par une véritable chasse au faciès social. Jamais la France n'avait connu une hécatombe de cette ampleur. Jamais non plus elle n'avait été le théâtre d'une si rapide et si massive dévolution des fortunes. Au paroxysme succéda presque sans transition un reflux général. Dans une page saisissante, Michelet raconte que son père passait devant l'opéra le lendemain de l'exécution de Robespierre et des autres dirigeants montagnards. Une foule élégante sortait du spectacle et des dizaines de cochers de fiacre s'empressaient, le chapeau à la main : «Une voiture, monsieur ?» «Par ici, mon maître !» Des mots que l'on n'avait plus entendus depuis deux ans, des manières que l'on croyait disparues. L'ordre ancien renaissait au milieu des décombres du désordre nouveau.
Article publié dans le n°797 du magazine Marianne, daté du 28 juillet au 3 août 2012.
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Nouveautés de GRAIN | 8 août 2012
Qui nourrira la Chine ; l'agrobusiness ou les paysans chinois ? Les décisions de Beijing ont des répercussions mondialesLa Chine est actuellement le plus grand marché alimentaire du monde. Ce que mangent les Chinois a des répercussions mondiales, parce que les pratiques de production de la nourriture et sa provenance ont un impact de plus en plus global. Quand la Chine commencé, vers la fin des années 1990, à importer du soja comme fourrage pour soutenir l'expansion de ses fermes industrielles, elle a déclenché dans l'agriculture l'un des changements les plus dramatiques que la Chine et l'Amérique latine aient jamais connu. Aujourd'hui Beijing s'engage sur la même voie avec le maïs, l'autre grande source de fourrage du pays, et les multinationales et les entreprises chinoises se précipitent pour développer et contrôler les centres d'approvisionnement de ce marché potentiellement gigantesque. Les retombées se font déjà sentir dans le monde entier : exode rural en Chine, accaparement des terres en Afrique, inflation alimentaire à Shanghai découlant de la sécheresse aux Etats-Unis. La Chine peut et doit changer de route en soutenant un système d'élevage à petite échelle qui s'appuie sur les ressources locales, plutôt que la production industrielle de viande.
Pour lire ce nouveau numéro d'A contre-courant en français, cliquez ici : http://www.grain.org/e/4549
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Je suis une des nombreuses victimes de l’arnaque de Bangkok
Dernier jour de vacances à Bangkok, mon amie et moi décidons de visiter le Jardin des plantes avant de nous rendre le soir même à l’aéroport.
En bonnes touristes avec le plan de la ville à la main, nous sommes accostées par un local très sympathique avec qui nous engageons la discussion. Il nous explique que le Jardin des plantes est fermé aujourd’hui et qu’en revanche, un très beau temple est ouvert à quelques minutes d’ici et nous parle aussi d’une promotion très intéressante dans les bijouteries de l’Etat car c’est l’anniversaire du roi. Il réussit même à nous arrêter un tuk-tuk et négocie pour nous un prix ridiculement bas pour nous y amener.
Après la bague en orSuite à l’article « L’étudiante et la bague en or, une arnaque bien ficelée », Sophie Letain a contacté l’auteur, Nesrine Baki, qui lui a conseillé de joindre Rue89 pour raconter son histoire. « Il s’agit d’une arnaque dont j’ai été victime en Thaïlande à Bangkok en 2009. Elle est remarquable pour plusieurs raisons : elle est très lucrative pour les aigrefins, extrêmement bien conçue et elle continue chaque année de faire de nouvelles victimes. »Arrivés devant le temple, le conducteur du tuk-tuk, également très sympathique (il se propose de nous reprendre à la fin de la visite du temple) nous demande de l’attendre quelques minutes.
Pendant son absence, un Français, la cinquantaine, look baroudeur et bon vivant nous aborde. Il vient de Bretagne, nous aussi, et la confiance s’installe assez rapidement. Il nous donne quelques bonnes adresses pour faire du shopping puis nous parle de cette bijouterie d’Etat et de ses incroyables promotions.
Une « combine » alléchante
Il en a fait un business : il achète des bagues en Thaïlande pendant ces promotions et les revend ensuite à Paris, Place Vendôme, le double voire le triple. Il en a parlé à son beau-frère qui se rembourse chaque année son voyage en Thaïlande avec cette « combine ». Il était d’ailleurs étonné qu’un local nous en ait parlé quelques minutes avant car ils ont plutôt l’habitude de garder ce bon plan pour eux...
Nous étions à la fin de notre voyage et avions dépensé beaucoup plus que prévu, cette « opportunité » était pour nous l’occasion de nous refaire un peu. Une fois le Français parti et le conducteur revenu, nous décidons de nous rendre directement à la bijouterie sans même visiter le temple pour lequel nous étions venues.
La bijouterie, pignon sur rue, façade impeccable, personnel attentionné et accueil princier nous met tout de suite en confiance. Les promotions y sont effectivement très attractives et après quelques minutes de réflexion, nous choisissons deux bagues en or, une sertie de rubis, l’autre de saphir pour 700 € chacune...
Escortées pour le reste de la journée
Nous récupérons les certificats d’authenticité et signons des papiers comme quoi les bagues sont destinées à être offertes et non à être revendues (pour éviter, nous dit-on, les éventuels problèmes à la douane). On nous propose ensuite une « escorte » pour le reste de la journée pour veiller sur nous et éviter qu’on se fasse voler.
Une employée de la bijouterie est désignée pour nous balader en 4x4 climatisé, elle négociera nos achats avec les commerçants et portera nos affaires jusqu’à ce que nous rejoignions notre chambre d’hôtel en fin d’après-midi et nous met bien en garde sur le fait que nous ne devrions parler de ces bagues à personne pour éviter d’attirer les convoitises. Comme elle était sympa et qu’elle s’était bien occupée de nous, on lui a payé un massage des pieds...
Nous ne sommes pas les seules
Ce n’est qu’en rentrant à Paris que nous commençons à réaliser que nous sommes tombées dans une arnaque... Et nous ne sommes pas seules, il suffit de taper « arnaque bangkok » ou « SNP Jewelery » pour se rendre compte de son ampleur.
Les bagues ne valent en fait que 10% du prix acheté, soit pas plus de 70€... Le sympathique local, le conducteur de tuk-tuk, le Français et la bijouterie sont tous acteurs de cette escroquerie et perçoivent certainement tous une partie des 1 400 € que nous leur avons laissés.
Je pense que cette histoire a un double intérêt : elle montre à quel point certaines escroqueries peuvent être complexes, presque « brillantes » et elle permettra aussi d’avertir les lecteurs de Rue89 car d’après ce que je sais, elle fait de nouvelles victimes chaque année.
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Une étude scientifique menée par l’Université d’Aston, en Angleterre, et soutenue par les ONG Générations Futures et Antidote Europe, parue dans le journal scientifique à comité de lecture PLoS One démontre les effets néfastes de mélanges de certains pesticides couramment utilisés.
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Les JO sont terminés? A mort le sport !
Lundi 13 Août 2012La critique de l'idéologie de la performance sportive engloutie avec les années 70? Pas du tout, philosophes et sociologues la remettent au goût du jour en librairie.
Ça commence par un bruit de fond, à peine un doute. Un chiffre qui sonne tout drôle aussi. Le budget des Jeux olympiquesn s'élève à 28,6 milliards d'euros. Quand on sait que Montréal a mis trente ans à rembourser les dettes contractées pour les Jeux d'été de 1976, que la Grèce, qui les a organisés en 2004, est loin d'être rentrée dans ses frais - 9 milliards d'euros -, on se demande si les Anglais ont vraiment de quoi exulter. Contrairement à une idée reçue, en effet, les Jeux enrichissent rarement la ville qui les organise, et profitent avant tout à la médiatisation des marques.
Mais ce formidable moment de communion entre les peuples ne doit surtout pas être entaché par des mesquineries comptables ! Voilà des années qu'on s'entend répéter que le sport exalte des vertus universelles telles que la compétition et le dépassement de ses propres limites. La performance à tout prix. La passion du «plus vite, plus haut, plus fort», comme le rappelle justement la devise olympique. Malgré l'ambiance de liesse générale, le doute se précise aux yeux de certains : à l'heure d'une crise du modèle capitaliste qui n'en finit plus d'étouffer l'Europe, ces «saines» valeurs ressemblent à s'y méprendre à celles qui nous ont conduits dans le mur.L'hégémonie du sport, ce «fléau mondial»
Conséquence du calendrier (deux grandes kermesses viendront rythmer l'été, les JO et le Championnat d'Europe de football), des voix s'élèvent aujourd'hui pour dénoncer le règne hégémonique du sport, ce «fléau mondial», pour reprendre une partie du sous-titre du livre de Marc Perelman (1), réédité cette année. Le philosophe Robert Redeker, collaborateur de Marianne, publie également un essai intitulé l'Emprise sportive (2), dans lequel il analyse ce phénomène mondial dont «chacun fait comme s'il allait de soi». Un ouvrage collectif de jeunes sociologues, le Sport contre la société (3), s'interroge aussi sur cette «institution centrale de la société capitaliste dominante» qui ne souffre nullement de la récession financière. Des revues telles qu'Inflexions (4) ou Vacarme (5) ont également consacré des numéros à la réflexion sur la place du sport, quand une autre, intitulée Quel sport ? (6), en est à son 16e numéro sur le sujet. Un roman, enfin, Dernier shoot pour l'enfer (7), raconte l'enquête d'un journaliste sportif qui accuse l'équipe de France de football de s'être dopée quand elle a gagné la Coupe du monde de 1998. «Bien qu'inspirée de faits réels et fondée sur de nombreux témoignages et documents, cette histoire est une fiction», prévient l'auteur, qui écrit néanmoins sous pseudonyme, au cas où la «fiction» en défriserait certains.
Pour l'essentiel, les thèses de ces ouvrages sont issues en droite ligne des années 70, quand babas cool et intellectuels critiques étaient unis dans une même aversion pour le culte de la performance. Les chaînes de télévision sportives (Tennis TV, Foot +, Golf Channel...) n'avaient pas encore envahi les bouquets satellite, mais le sport était déjà accusé de focaliser l'attention de la planète entière sur ces jeux du cirque modernes, transformant «l'intelligence en un muscle tendu vers la victoire et le gain» (Robert Redeker). A l'époque, l'écho de ces idées ne se limitait pas au timide bruit de fond que l'on croit entendre aujourd'hui. Le sociologue Jean-Marie Brohm, ancien professeur d'éducation physique et figure tutélaire de la critique radicale du sport en France, se souvient : «Quand nous avons organisé le comité pour le boycott de l'organisation par l'Argentine de la Coupe du monde de football en 1978, il y avait eu un véritable mouvement de masse. Nous avions le soutien de Vladimir Jankélévitch, de Foucault, de Catherine Deneuve...» Mais aussi de Jean-Paul Sartre, Jean-Marie Domenach, Louis Aragon, Simone Signoret ou Marek Halter. La pétition lancée par le comité avait récolté pas moins de 150 000 signatures. C'était il y a plus de trente ans.
Entre-temps, des centaines de «records historiques», de «rencontres au sommet» et de «performances inoubliables» ont façonné notre passion collective. Unanimement considéré comme une bénédiction pour l'humanité, le sport a éjecté toute pensée dissonante hors du débat public. Cet état de fait a revêtu un caractère définitif le 12 juillet 1998, quand l'équipe de France a remporté la Coupe du monde de football. Politiques, intellectuels de droite comme de gauche, femmes, enfants, publicitaires, cols blancs et cols bleus, Blacks, Blancs, Beurs : la France a connu un orgasme généralisé. En 1997, anticipant peut-être la déferlante, Jean-Marie Brohm choisissait de dissoudre sa revue pionnière dans la critique radicale du sport (Quel corps ?, qui ressuscitera dix ans plus tard sous le nom de Quel sport ?) : «D'un côté, cela confirmait nos thèses au-delà de nos espérances, c'était une véritable mystification de masse ! Mais, de l'autre, l'événement a placé notre discours dans une telle situation de décalage qu'il fallait réfléchir à notre orientation stratégique.»Les Jeux, marketing international
D'autres éléments sont venus donner raison à Jean-Marie Brohm et à ses camarades de lutte. Les institutions sportives internationales, comme le Comité international olympique (CIO), indifférentes aux multiples scandales de corruption qui les ont éclaboussées, n'hésitent plus à le claironner sur leurs sites Internet : «Les Jeux olympiques sont l'une des plates-formes les plus efficaces de marketing international, atteignant des milliards de personnes dans plus de 200 pays et territoires à travers le monde [8].» Des Etats ayant une conception pour le moins élastique des droits de l'homme, comme la Chine, continuent à se servir de ces manifestations internationales pour légitimer leur pouvoir et polir leur image.
La course aux médailles a aussi autorisé une sélection des athlètes dès le berceau et des rythmes d'entraînement qui feraient presque passer l'univers totalitaire du sport qu'imaginait Georges Perec dans W ou le souvenir d'enfance (1975) pour une promenade de santé. Dans le Sport contre la société, le sociologue Clément Hamel rappelle ainsi les circonstances infiniment poétiques qui ont présidé à la naissance du joueur de basket-ball chinois Yao Ming : «Lorsque sa mère, Fang Fenghi, 1,88 m et capitaine de l'équipe nationale féminine, prend sa retraite, les autorités sportives lui "suggèrent", comme c'est l'usage depuis Mao, de "produire un champion". Elles lui trouvent rapidement un père, Yao Zhiyuan, 2 m et joueur d'un des clubs pro de Shanghai.» Résultat : un rejeton de 2,29 m prêt à l'usage.
Les records devant être battus à chaque compétition pour assurer le show, la nature a certes besoin d'un coup de pouce pour fabriquer des athlètes à la hauteur du défi. «Là-dessus, il faut être cohérent et un peu honnête, confie le footballeur Vikash Dhorasoo à la revue Vacarme. On ne peut pas demander aux gars de battre des records, aux cyclistes de monter des cols à des vitesses incroyables, et tout ça à l'eau claire. Défendre à la fois la course à la performance à tout prix et la chasse au dopage, c'est prendre les gens pour des imbéciles.» Cette violence que les sportifs retournent contre eux-mêmes, les supporteurs s'en font l'écho à leur manière. Dans son dernier numéro, Quel sport ? dresse une liste non exhaustive des «centaines de faits de violence mortifères avérés qui ont lieu chaque saison, depuis une bonne quarantaine d'années, à l'intérieur et autour des stades» : «Maroc, sept morts après un match de foot», «Hooliganisme : 13 personnes condamnées à Lucerne», «Tunisie : un stade de football évacué après des violences», etc.Injonction au «bougisme»
Seulement voilà, ces scandales n'intéressent personne. Tenus pour des dérives n'ayant rien à voir avec l'«essence» du sport, ils sont oubliés en moins de temps qu'il n'en faut pour décapsuler une bière devant un bon OM-PSG. Difficile, en effet, d'exercer encore un jugement critique quand le sport s'est infiltré dans tous les domaines de nos vies. «Ce n'est plus tant la guerre qui est un "grand match", mais la vie elle-même, la "lutte" de tous contre tous dans un monde au devenir incertain, écrit Luc Robène dans Inflexions. L'univers de l'entreprise, à son tour, est irradié par ces images de chocs, d'affrontements, de stages physiques, de préparation au combat économique, de constitution d'équipes de collaborateurs offensifs coachés par des directeurs de ressources humaines inspirés.»
Sur nos CV, nous n'oublions jamais de mentionner nos faits d'armes sportifs pour démontrer notre combativité. Le ministère de la Santé et ses injonctions au «bougisme» ont scellé dans les esprits le lien entre «sport» et «santé», et c'est bien pour dompter nos corps, toujours trop flasques comparés à ceux des «dieux du stade», que nous nous précipitons sur les tapis de course et les rameurs des clubs de fitness. «Ces milliers de coureurs du dimanche qui éructent et crachent leurs poumons avec leur MP3 sur les oreilles comme des troupeaux hypnotisés par l'idéologie du bien-être égocentré» ne laissent pas de consterner Fabien Ollier, digne héritier de Jean-Marie Brohm. Dans son lycée du sud de la France, ce prof d'éducation physique et sportive, philosophe, s'efforce de déclencher chez ses élèves une prise de conscience de l'impact du sport sur les liens sociaux : «L'incitation majeure des pouvoirs publics et des médias, c'est d'éprouver son corps dans la douleur. La valorisation incessante de cette défonce physique a un sens politique : il s'agit d'une autochloroformisation des consciences par le biais de la fatigue volontaire. Les endorphines opioïdes sont sécrétées, le corps plane, on ne pense plus. C'est un shoot généralisé que chacun se prodigue pour oublier la triste réalité.»
Il ne s'agit naturellement pas de dire que posséder une paire de Nike est le plus court chemin vers la servitude volontaire. Mais on constate que, tandis qu'on s'autorise aujourd'hui à remettre en question le néolibéralisme, l'idéologie sportive, elle, n'est jamais inquiétée. Rêver d'un autre modèle économique, d'accord, mais à condition de ne jamais bousculer un phénomène qui concentre pourtant toutes les tares du vieux système.
E.E.
(1) «Le Sport barbare». Critique d'un fléau mondial, de Marc Perelman. Réédité en 2012 chez Michalon.
(2) «L'Emprise sportive», de Robert Redeker, François Bourin Editeur, parution le 23 mai 2012.
(3) «Le Sport contre la société», de Clément Hamel, Simon Maillard, Patrick Vassort, Le Bord de l'eau, parution le 14 juin.
(4) «Inflexions» no 19, «Le sport et la guerre», La Documentation française.
(5) «Vacarme» no 45, textes disponibles sur vacarme.org/rubrique310.html
(6) «Quel sport ?», disponible sur quelsport.free-nux.org
(7) «Dernier shoot pour l'enfer», de Ludo Sterman, Fayard Noir.
(8) Citation extraite du «Sport contre la société».
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http://www.amnesty-informations.be/p_v.php?mi=1071&nl=26&ei=mj.besson%40voila.fr
L'héritage toxique de Dow Chemical ternit encore Londres 2012
Alors que Londres se prépare à accueillir les Jeux olympiques, Amnesty International examine ses liens avec l'une des plus grandes catastrophes industrielles de l'histoire.
En plein cur de l'est londonien, au milieu d'un mélange incongru de tours en verre étincelantes et de bâtiments industriels, se dresse le stade olympique. C'est un cercle blanc parfait, si grand qu'il ressort nettement sur Google Earth. Cette arène de 80 000 places, considérée comme le joyau du village olympique de Londres, est entourée d'une bannière en tissu coûtant 7 millions de livres sterling fournie par l'un des premiers fabricants mondiaux de produits chimiques, Dow Chemical.
Il y a près de 30 ans, en décembre 1984, la ville indienne de Bhopal a été le théâtre de l'une des plus grandes catastrophes industrielles de l'histoire, provoquée par une fuite de gaz toxique à l'usine de pesticides Union Carbide. Entre 7 000 et 10 000 hommes, femmes et enfants ont trouvé la mort immédiatement après cette fuite, environ 15 000 autres décès sont survenus dans les années qui ont suivi, et plus de 100 000 personnes continueraient de souffrir de graves problèmes de santé liés à la catastrophe.
Depuis 2001, Dow possède la totalité des parts d'Union Carbide Corporation (UCC), société dont la filiale indienne possédait et exploitait l'usine responsable de la catastrophe de Bhopal en 1984. Union Carbide a quitté Bhopal sans décontaminer le site, sans révéler la nature exacte du gaz échappé de son usine et sans indemniser les victimes de manière satisfaisante. Malgré cela, UCC et sa maison-mère, Dow, nient toute responsabilité dans la tragédie qui se poursuit à Bhopal. [Plus d'information...]
Très important : merci de transférer cet appel par email à un maximum de personnes susceptibles d'être intéressées.
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Le projet Sen Huile-Sen Éthanol une nouvelle opportunité de développement pour le waloPublié: 13 aout 2012Publié dans: SénégalA terme, le projet devrait produire 550 tonnes de graines de tournesol, 19500 tonnes de patate douce et 3120 m3 de bioéthanol par jour, les tiges et les fleurs pourront servir à la production de bioénergie et au fourrage pour le bétail.
Le projet sen huile-sen éthanol une nouvelle opportunité de développement pour le waloLe président de la République, Macky Sall, vient de signer le décret accordant 10 000 hectares de terres à la Société Sen Huile - Sen Ethanol dans la communauté rurale de Gnith, dans le département de Dagana pour l’installation d’un des plus grands projets agro-industriels de l’Afrique de l’Ouest.
Pour un investissement envisagé de 137 milliards de FCFA le projet dénommé Sen Ethanol et Sen Huile compte produire notamment de l’’éthanol, de l’’huile de soja et de la patate douce. Le projet qui va créer 5 000 emplois, selon ses promoteurs, était prévu dans la communauté rurale de Fanaye du Sénégal, mais avait dû être suspendu devant l’opposition des populations locales foutanké.
Le projet comptant aussi produire du biocarburant, intègre l’installation d’une centrale électrique à bagasse de 40 Mw dans la plantation de tournesol et d’une autre de 400 Mw dans la plantation de patate douce. Les promoteurs ont aussi envisagé de produire du gaz à partir de la culture d’algues.
A terme, le projet devrait produire 550 tonnes de graines de tournesol, 19500 tonnes de patate douce et 3120 m3 de bioéthanol par jour, les tiges et les fleurs pourront servir à la production de bioénergie et au fourrage pour le bétail.
L’adhésion massive des populations de Gnith à ce projet n’est pas fortuite, car en plus de ses terres fertiles et des ses eaux limoneuses, le Walo présente d’autres avantages attractifs et comparatifs comme l’esprit d’ouverture, et d’accueil de ses habitants à tout projet d’investissement dans leur terroir.
Depuis le traité de Ndiao du 8 mai 1819, de Schmaltz à Jacques Mimran, sur une période deux siècles les populations du Walo ont accueilli à bras ouverts tous ceux qui ont investi leur capital, leurs connaissances pour valoriser leur terres.
C’est à Richard-Toll ou fut implantée la première station expérimentale agricole de l’Afrique noire. Le coton, l’arachide, le sésame, l’indigo, furent introduites, essayées et disséminés dans toute l’Afrique grâce au jardin d’essai de Richard-Toll.
Depuis l’époque du champ de l’ingénieur colonial français Claude Richard , en passant par la MAS, la SDRS et la CSS, plusieurs générations de travailleurs walo walo ont pu capitaliser des connaissances, des savoir faire multiformes de tout ce qui touche le secteur agroindustriel .
Au niveau de certaines spéculations comme la tomate, le riz, la patate douce et la canne à sucre, les rendements à l’hectare qui se font au Walo frisent les records mondiaux. Ainsi le projet pourra trouver dans le Walo toute une expertise locale comprenant tous les métiers agroindustriels pour le démarrage optimum de ses activités.
L’installation de projet devrait pousser l’état sénégalais à initier un plan local d’aménagement pour toute la zone ouest du lac de Guiers et même un nouveau découpage territorial ramenant au Walo les communautés rurales de Keur Momar Sarr et de Syer
Notons que ce plan devra aussi permettre le désenclavement de la communauté rurale de Gnith qui borde le versant ouest du Lac de Guiers avec le bitumage de la bretelle longue de 35 Km (Ngnith,/colonat Richard Toll). Cette nouvelle route reliera cette partie du Walo à Louga par Keur Momar Sarr et permettra d’écouler toute la production agricole du departement de Dagana vers Dakar en débouchant sur le Louga sans passer par la ville de Saint- Louis, ce qui donnera un raccourci d’environ de 100 Km.
Cette bretelle bitumée reliera la route internationale transsaharienne venant du Sud de l’Espagne aux rives du fleuve Sénégal en passant par le Maroc et la Mauritanie et débouchant à Rosso Sénégal à la route nationale 2 à louga
Certes si les 37 chefs de village de la zone ont eu au nom des populations décidé d’accompagner le chef de l’Etat sur ce projet qui va générer des milliers d’emplois, il faudra aussi convoquer un CDD de Dagana élargi à toutes les forces vives du Walo afin d’approfondir la réflexion sur tous les impacts possibles en termes environnementaux et socio économiques entre autres.
Le projet Sen Ethanol – Sen Huile prévoit un volet social au profit des populations. Ce sera un programme social d’une enveloppe de 800 millions FCfa par an qui est sera mise à la disposition des communautés rurales de Ngnith, Diama et de Ronkh afin de prendre en charge leurs besoins en éducation et en santé.
Pour ce qui concerne la santé, c’est auprès des populations de la communauté rurale de Ngnith que l’on trouve l’un des taux les plus élevés de prévalence de la bilharziose intestinale au monde.
Le problème de la schistosomiase est souvent lié aux modifications de l’environnement, et la création de complexes agro industriels comme le projet dénommé Sen Ethanol et Sen Huile pourrait conduire à une aggravation du problème de cette endémie. Il est donc nécessaire d'attirer l'attention des initiateurs du projet, en paiement de leur responsabilité industrielle et en application sur les conséquences sanitaires de leurs politiques de prendre des activités, des mesures de luttes anti vectorielles (surveillance malacologique et nettoyage des sites de transmission) ce qui diminuera fortement la prévalence de la bilharziose.
Afin de renforcer l’offre de soins du département de Dagana, un projet de construction d’un l’hôpital de Richard –Toll est actuellement initié à travers un partenariat public privé avec tous les grandes sociétés agro-industrielles déjà installées au Walo, le projet Sen Ethanol – Sen Huile pourrait le rejoindre et y participer.
Ce partenariat public privé dans lequel participerait le projet pourrait être mis à profit afin de promouvoir aussi la construction d’une université des métiers liés à l’agro-industrie.
Cette zone du Sénégal frontalière avec la Mauritanie, étant sous la menace potentielle d’activistes salafistes devra voir sa sécurité renforcée par la construction de camp militaire ou de gendarmerie. Les seuls camps militaires de la vallée se trouvent à équidistance de 100 km du Walo dans les villes de Ndioum et à Saint-Louis
Nder la capitale historique du Walo se trouvant dans la communauté rurale de Gnith le projet projet Sen Ethanol – Sen Huile à travers un mécénat pourra aussi réhabiliter ce site historique et en faire une destination touristique.
Mais l’état avec les collectivités locales du département de Dagana devra organiser un atelier de réflexion sur le bilan des plusieurs décennies d’exploitation agroindustrielle au Walo et les leçons apprises permettront une approche qui pourra minorer tous les éventuels impacts négatifs du projet.
Nous espérons que la réussite du projet dénommé Sen Ethanol et Sen Huile dans le delta incitera nos parents foutanké de la moyenne vallée d’être plus accueillant vis-à-vis d’éventuels investisseurs afin les immenses potentiels agricoles puissent être mis en valeur pour le bénéfice de toute la nation sénégalaise.
Amadou Bakhaw DIAW Président du W.E.E.S Walo
Education Environnement Santé diaogo.nilsen@gmail.com
Tew Mou Tew NewsSource: Leral.net
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A l'origine de plusieurs publications sur la gouvernance de l'eau, l'OCDE a piloté les travaux sur la gouvernance lors du dernier forum mondial de l'eau de Marseille. Questions à Aziza Akhmouch, qui coordonne ce sujet au sein de la Direction de l'OCDE « Gouvernance publique et Développement territorial ».
Novethic : Que répondez-vous à ceux qui contestent la monétisation de l'eau au motif qu'elle est un bien commun et doit être accessible à tous ?
Aziza Akhmouch : L’eau est un bien commun, mais l’accès garanti à une eau de bonne qualité est un service qui ne peut être assuré qu’à un certain coût. Il n’y a que 3 moyens de couvrir ce coût : faire appel aux consommateurs (via une facture d’eau), aux contribuables (via les impôts), à la solidarité internationale (via l’aide au développement, ou les fonds structurels européens). L’OCDE, avec ce concept des « 3Ts » (taxes, tarifs, transferts) plaide pour une juste répartition entre ces trois sources de financement, qui doit être étudiée au cas par cas et faire l’objet d’un débat politique.
En règle générale, ne pas faire payer l’eau aux usagers génère des gaspillages et conduit à un sous-investissement dans le service public de l’eau, qui pénalise les plus pauvres (ils devront acheter de l’eau plus chère et de moins bonne qualité à des revendeurs). Il est souvent plus efficace de refléter le coût du service dans le prix et de mettre en œuvre des mesures d’accompagnement ciblées pour les plus pauvres.
Est-ce que la politique de l'Afrique du Sud, qui consiste à faire payer l'eau au delà d'un minimum vital (environ 25 litres/ personne, selon l'AFD), est une "best policy" que l'OCDE promeut ? Qu'en pensez-vous ?
C’est une des options. Toutefois, certaines études montrent qu’elle pénalise les familles pauvres, souvent nombreuses, dans la mesure où la consommation n’augmente pas nécessairement avec le revenu. D’autres mesures, mieux ciblées sur les familles pauvres, peuvent être plus efficaces ; elles relèvent généralement des politiques sociales et non du prix de l’eau.
Quelles mesures par exemple ?
Le passage à un tarif progressif, par exemple, permet de mieux tenir compte des objectifs de protection de la ressource et de fourniture à tous d’un quota d’eau potable à prix réduit. Néanmoins, pour éviter de pénaliser les ménages nombreux, il convient de choisir parmi les différents tarifs progressifs un tarif “équitable” qui garantit un même prix moyen du litre d’eau pour tous les usagers domestiques desservis par un même réseau. Ce critère d’équité est très important car pour être socialement acceptable, le prix de l’eau ne doit pas être trop défavorable pour un type de foyer plus qu’un autre (entre familles nombreuses et les personnes seules par exemple).
A Paris, La Mairie, consciente des problèmes financiers que cause le prix de l’eau et de l’assainissement pour les personnes pauvres a institué des programmes d’aides. Par exemple, en 2009, elle a adopté le principe selon lequel les dépenses d’eau et d’assainissement ne devraient pas dépasser 3% des dépenses de consommation des ménages. Plus de 44 000 ménages démunis ont bénéficié d’une allocation de solidarité eau qui représente environ le tiers de la facture d’eau. L’aide ainsi attribuée représente près de 1% des dépenses totales d’eau des ménages. Ces aides municipales pour l’eau complètent les importantes allocations de logement de l’État (Caisses d’allocations familiales, etc.) et de la Ville de Paris.Quel regard portez-vous sur le mouvement de récupération de la gestion des eaux municipales par les collectivités locales françaises ?
Le renouvellement des délégations et concessions est assez lent, compte tenu de la durée des contrats. Il est normal que le retour en régie fasse partie des options étudiées par les autorités responsables de la gestion du service public d’eau et d’assainissement. Cela renforce la concurrence auxquels les opérateurs privés sont confrontés. Il est important que cette option, comme les autres, fasse l’objet d’une évaluation a priori, et d’un retour sur expérience, afin que les collectivités apprécient les forces, les faiblesses et les conditions de succès de chaque option.
La Water Governance Facility (WGF) du PNUD estime que la gouvernance de l'eau doit inclure la clarification des rôles et responsabilités de toutes les parties prenantes. Que pensez-vous de cette affirmation ?
L’OCDE dans son rapport de 2011 « La Gouvernance de l’Eau dans les Pays de l’OCDE : une approche pluri-niveaux » préconise également cela. Le secteur de l’eau est caractérisé par une très grande fragmentation institutionnelle et territoriale. C’est un enjeu à la fois local et mondial, avec une pluralité d’acteurs (publics, privés, associatifs) à différentes échelles et souvent il est très difficile de savoir qui fait quoi. Or pour guider l’action publique, mettre en place des lois, des régulations, des standards, il est indispensable d’identifier les acteurs et les responsabilités respectives. Mais cette première étape n’est pas suffisante, il faut au-delà de cette cartographie des acteurs identifier un certain nombre de déficits de bonne gouvernance et des bonnes pratiques pour y remédier. Le travail de l’OCDE apporte des réponses à ces questions. Nous avons par exemple testé la grille d’analyse « OECD Multilevel governance Framework » dans 17 pays de l’OCDE, 13 pays d’Amérique latine. Elle permet d’apporter des recommandations sur les plans de la gouvernance, du financement, de la régulation et de la gestion par bassin.
Propos recueillis par Thibault Lescuyer
© 2012 Novethic - Tous droits réservés 24-07-2012
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