•   Les lois de la conso unique

    Mercredi 19 Février 2014   Valérie Hénau  (Marianne) 
     
       Pourquoi a-t-on soudain une folle envie d'un tapis berbère ? Ou tombe-t-on amoureux du prénom Nathan, au point de le donner à son petit dernier (comme une majorité des bébés mâles nés en 2013) ? Comment se fait-il qu'on trouve très finaud de dire "Allô ?" à sa mère sourdingue, en parodiant Nabilla ? La force du conformisme, plus impérieuse que jamais, avec les nouvelles technologies. Voyage au pays des nouveaux suiveurs, ces "dandys grégaires" chers à Alain Finkielkraut.

    Chambre Ikéa - Alex Segre/REX/REX/SIPA
    Chambre Ikéa - Alex Segre/REX/REX/SIPA
      La soumission délibérée à la norme

    Peur du ridicule, désir d'en être, honte d'être méjugé, angoisse d'être méprisé : l'emprise de la norme est toujours plus puissante qu'on veut bien l'admettre. Et pour cause. Afficher des signes d'appartenance à un groupe offre d'évidents bénéfices, qu'il serait absurde et immodeste de nier. Cela nous simplifie la vie, fluidifie nos relations, nous aide à nous faire des amis, à trouver un conjoint rassuré de partager les mêmes codes que nous. Les guides d'us et coutumes proliférant actuellement en librairies (Je parle le parisien, Manuel de style GQ...) tout comme les rubriques normatives des magazines («A faire/A ne pas faire», «En hausse/En baisse») sont les nouveaux manuels de bonnes manières.

    Leurs règles sont aussi subtiles que déterminantes. Par exemple, dans certaines tribus contemporaines du monde occidental, on trouve follement chic la verrine de saumon au guacamole et piment d'Espelette (famille «Un dîner presque parfait»). Dans d'autres, on frôle le suicide social si on s'adonne à cette pratique décrétée ringarde (famille «Bistronomie», obédience fooding).

    Tout cela explique qu'on va rarement s'approvisionner dans des classes sociales ou d'âge qui ne sont pas les nôtres. Si vous êtes un homme, chef d'entreprise quinqua dans l'agroalimentaire, à moins d'être manipulé par une jeune maîtresse vendeuse dans le Marais, vous n'allez pas vouspointer au bureau en jean brut APC, ceinture en cuir végétal, cardigan Uniqlo et barbe de trois jours. Mais plastronner en costume Monsieur de Fursac, la joue glabre et le mocassin Finsbury bien ciré, comme vos pairs...

    La fureur de la distinction

    Le paroxysme de la soumission à la norme est atteint à l'adolescence, où l'on tuerait père et mère pour avoir les bonnes baskets. Mais attention, celles-ci ne sont pas les mêmes selon qu'on est une minette localisée dans un quartier bourgeois traditionnel (cette année, plutôt les «Blazer» de Nike ou des Stan Smith) ou une jeune bobo dont l'écosystème s'épanouit, à Paris, autour du canal Saint-Martin (ce seront alors des National Standard made in France ou des Veja fourrées équitables).

    Les réseaux sociaux - où l'on se fait plébisciter in vivo - ont follement emballé la machine à fabriquer des diktats. Ils peuvent atteindre une dimension affective ahurissante (cris de goret qu'on égorge pour un casque maltraité, roulades par terre pour une histoire de béret, etc.). La démultiplication des tribus et les infinies nuances vestimentaires qu'elles autorisent permettent à la fois de s'inscrire dans un vaste troupeau (en gros «la culture jeune») et d'afficher des micromarquages d'autant plus impérieux qu'ils paraissent insignifiants aux non-initiés (les parents de l'ado, ontologiquement bornés). Col de la chemise ouvert ou boutonné, forme du bonnet, longueur exacte du caban...

    La posture oppositionnelle

    L'adhésion irrépressible aux totems d'une caste est parfois renforcée par le rejet d'une autre caste, dont on veut s'affranchir (et dont on gardera parfois à vie la nostalgie poignante). Ainsi, on ne se dit pas «Je suis un grand fauve des médias qui redoute d'être pris pour ce qu'il est» (un petit-bourgeois monté en graine, genre Fogiel) mais : «Je ne veux pas faire vieux comme chez tatie Georgette.» Et on investit dans une chaise longue en poulain Le Corbusier ou un fauteuil à bascule Eames... comme 65 % de nos confrères, confrontés à des problématiques semblables d'ascension express.

    De même, le néobanquier branché offrira-t-il à son salon, après avoir viré tous ses meubles de famille en acajou, un total look Paola Navone pour Gervasoni (marque italienne culte). En même temps qu'à peu près toutes les épouses de ses copains de bonus qui, elles aussi, fréquentent assidûment les sites Made in Design, Blue Sun Tree, Le Cèdre rouge et autres fournisseurs officiels de la bourgeoisie moderne, en rupture de bergères Louis XVI.

    De son côté, le people yankee, un brin cagole à la base, ne révèle pas officiellement son aspiration récente au vrai chic. Mais, à l'instar de la bimbo de télé-réalité Kim Kardashian, nomme son pauvre bébé «North West» (plus distingué que Cindy ou Shelly, pense-t-elle). Exactement comme toutes les autres stars du moment qui, avec un bel ensemble, donnent systématiquement à leurs enfants des prénoms exotiques ou insolites (Maddox, Blue Ivy, Bronx Mowgli) pour occulter leurs origines middle-class. Du coup, cette soumission inconsciente à un fantasme d'originalité les trahit aussi sûrement que Quitterie ou Wandrille sentent le BCBG à plein nez !

    Le mimétisme concurrentiel

    Lumineusement démontré par le philosophe chrétien René Girard, c'est un des fondements de notre modernité matérialiste. Toute convoitise s'inscrit dans un triangle mimétique : notre désir d'un objet est surdéterminé par le désir (supposé) d'un rival pour ce même objet. Lequel brigue ce bien en symétrie. Bref, tout le monde se tient par la barbichette, et le commerce (sinon la créativité) va bon train... Ma cousine en cherche un partout ; Je l'ai vu chez Carla Bruni dans Gala ou, en vrai, dans la salle à manger de ma chef de service ; Il trônait, si beau et bigarré, dans les pages cadeaux du dernier Vanity Fair ou le supplément «Style» d'un quotidien...

    C'est dit, il me le faut absolument, ce perroquet empaillé ! Si d'aventure un autre client rôde avec intérêt autour du volatile dans la boutique, on ne se tient plus : on rafle la bête sans même un regard pour l'étiquette. La presse féminine joue énormément sur ce ressort en estampillant telles bottes de squaw à franges d'un cupide «A voler aux stars». Tel sweat-shirt à tête de rottweiler, pourtant hideux, d'un «Copié sur les podiums» qui le rend instantanément tentateur. Elle mise ainsi sur l'un de nos plus bas instincts : l'envie de s'approprier ce que possède - ou pourrait posséder - l'autre.

    L'imitation des sous-modèles de consommation

    Et si cet autre est plus riche, plus beau, c'est encore meilleur. Certaines jeunes femmes vaguement célèbres - mannequins, actrices, égéries, présentatrices, filles de - sont discrètement appointées (ou au moins arrosées de présents) par les marques pour exciter cette rivalité virtuelle entre femmes. Si votre adolescente de 16 ans s'est brusquement entichée d'un sac bizarre, qui a tout de la sacoche du toubib de campagne, n'y voyez pas l'expression de son style personnel si original.

    Elle l'a vu sur Cara (Delevingne) ou Alexa (Chung) - ça ne vous dit rien, c'est normal - et acheté sur les sites de vente en ligne Asos ou Urban Outfitters, surappâtée par la mention «Plus qu'un exemplaire en stock» de ces redoutables fabriques à clones. Apparemment, il en restait un peu plus puisque ses copines ont aussi décroché le leur. Il va sans dire que les blogs de street style (photos de looks de rue approuvés par l'internationale de la mode) démultiplient encore cet effet d'imitation subliminal.

    L'éternel retour du même

    Au journal Elle, elles adoooorent cette mode charmante des chaussettes portées dans les escarpins et matraquent cette nouveauté chaque semaine depuis un mois. Ça tombe bien, vous aussi, vous aimez beaucoup ! Quelle coïncidence incroyable, n'est-ce pas ? Eh bien non, en fait. Pourquoi parle-t-il tant à la femme de 40-50 ans, ce récent - et objectivement grotesque - tic de mode, en passe de devenir un tsunami stylistique, selon les pythies du genre ?

    C'est qu'en 1983, dans sa brève période new wave ou ska, elle faisait de même dans ses chaussures pointues... Cela faisait alors sourire sa maman qui, elle-même dans sa période postexistentialiste-crypto-Juliette Gréco, avait bravement tenté la socquette/ballerine avec une jupe ample, circa 1955. Cet engouement qui semble venu de nulle part est une illustration mineure de la fameuse «théorie de l'empreinte» qui, si l'on en croit les psychologues, préside à la plupart de nos choix, en amour, comme au supermarché.

    La théorie de l'empreinte

    On est souvent tenté par ce qui nous rappelle quelque chose, ce déjà-vu dans nos vies antérieures qui, réactivé habilement, fait tilt à nouveau. Accessoirement, ces réminiscences sont le gagne-pain du «tendanceur» des bureaux de style, escroquerie moderne. Ce prescripteur de «nouvelles tendances», dont les médias boivent avidement la parole, prétend décrypter les toquades de masse (cet hiver sera mauve, comme le précédent a été vert émeraude...), tel un quasi-devin.

    En réalité, le charlatan se contente de surfer sur l'amnésie collective en matière de style. Au grand dam des historiens de la mode, en effet, les courants vestimentaires des trente dernières années sont la resucée de ceux lancés dans les années 50 et 60 par les zazous des classes moyennes ou prolétaires. Copiés dans les années 80 par les faux «rebelles» de la nouvelle bourgeoisie libertaire (en réaction contre la bourgeoisie vertueuse déclinante, moins consumériste), ils se répètent mécaniquement tous les cinq ans.

    La déferlante massive du design vintage 70, vrai ou faux, en déco relève du même principe : les appartements des jeunes branchés d'aujourd'hui ressemblent souvent à s'y méprendre à des chambres du Novotel de Rouen en 1969... Vous reprendrez bien un peu d'omelette norvégienne au dessert ?

    Le second degré pour tous

    Ah, ah, ah, suis-je drôle avec ma petite collection de figurines japonaises ou de bondieuseries kitsch sur la cheminée ? Et mon voisin, qui joue à la pétanque ou au Baby-foot en espadrilles, avec ses amis créatifs, tout en plantant des nains de jardin sur sa terrasse ? Ne sommes-nous pas délicieusement impertinents, en adoptant ostensiblement des loisirs et des goûts de ploucs ? Alors qu'on pourrait, comme des cadres sup de base, faire un tennis et acheter des babioles design à la Conran Shop ou chez Sentou !

    Magie du second degré ou quand la radinerie se pare d'humour... Le détournement du «ringard» est devenu l'astuce contemporaine majeure pour faire son intéressant à peu de frais (aux sens propre et figuré). L'artiste Jeff Koons a fait fortune avec ce filon et ses «Balloon Dogs» sont désormais copiés partout, en bougies ou lampes gadgets. Et l'on ne parle pas des hipsters, cette tribu soi-disant décalée qui a réussi à imposer les grosses lunettes de Superman, les slims colorés de clown et les tee-shirts à message idiot à quasiment l'ensemble du monde développé (enfin, celui qui a moins de 35 ans).

    Faites passer : vous êtes repérés, les gars ! Le recyclage de plus en plus accéléré des contre-cultures (le punk, le rap, les graffitis) est un des grands tours de force du conformisme contemporain : voir cet hiver tous ces mannequins de 16 ans aux dents bien rangées et au teint de rose poser dans les pages de mode en Perfecto cloutés et oripeaux écossais. Les Sex Pistols survivants doivent bien rigoler...

    La subjectivité téléguidée

    Deux copines se retrouvent pour déjeuner. Même robe portefeuille Diane von Furstenberg, grand manitou de la tenue power dressing pour quadras à gros jobs. «C'est dingue, on a les mêmes goûts, se réjouit l'une. - Non, les mêmes conditionnements», répond l'autre, avec mélancolie (spleen de la consommatrice qui se sent devenir banale). En général, plus on a l'impression d'être un électron libre, plus on s'inscrit dans un troupeau prédéfini.

    Le très couru blog de décoration «The Socialite Family», par exemple, est un vrai catalogue des conventions inconscientes du moment. Censé exalter le goût merveilleusement original et intuitif des jeunes familles upper-class d'aujourd'hui, il est une compilation troublante d'appartements témoins des années 2010. Ces gens ne se connaissent pas et se sont donné visiblement beaucoup de mal pour être innovants. Pourtant, ils ont tous des branches de pommier sauvage et des peaux de mouton nordiques immaculées dans leur living !

    Tout le marketing de la «marginalité ludique» consiste à nous faire prendre nos déterminations les plus lourdes pour le reflet de notre subjectivité géniale, une espèce de sixième sens. On peut d'ailleurs grosso modo être sûr que, dès que l'on fait appel à notre moi rebelle et indomptable (toutes ces injonctions publicitaires d'«Osez oser» pour nous vendre une voiture ou un téléphone), on rejoint la cohorte des «dandys grégaires» (Finkielkraut). La floraison insensée chez les bourgeoises de pulls en cachemire affichant une tête de mort ou un grand «rock» (c'est la faute à Zadig & Voltaire) dans le dos est à cet égard impayable...

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  • Plus de 15 millions d'enfants de cinq à 17 ans travaillent dans le monde comme domestiques chez des tiers.

    Le travail domestique chez les enfants est présent dans toutes les régions du monde. 

    Le travail domestique chez les enfants est présent dans toutes les régions du monde.

    Les enfants sont soumis à des violences physiques, psychiques, parfois sexuelles, a dénoncé mardi à Genève le Bureau international du travail (BIT).

    «Le travail domestique des enfants est l'une des formes les plus difficiles du travail des enfants à éliminer, car il est le plus souvent clandestin», a déclaré la directrice du programme du BIT pour l'abolition du travail des enfants (IPEC) Constance Thomas.

    Les 15,5 millions d'enfants employés comme domestiques représentent 5% du total des enfants occupés économiquement, soit 305 millions de jeunes de 5 à 17 ans. Parmi eux, 73% sont des filles. Ils sont 7,4 millions à faire un travail domestique entre 5 et 14 ans.

    «Le travail domestique chez les enfants est présent dans toutes les régions du monde», a affirmé Constance Thomas. Il est fréquent dans certains pays africains. Selon l'étude du BIT, le placement d'un enfant pour du travail domestique a été relevé par exemple au Burkina Faso, en Côte d'Ivoire, au Ghana et au Mali.

    Proche de l'esclavage

    Cette forme de travail se rapproche dans les cas les plus extrêmes de l'esclavage. De longues heures de travail, de lourdes charges, l'exposition à des outils dangereux et substances toxiques, la peur, des humiliations, des punitions violentes et abus sexuels sont alors monnaie courante.

    Des familles rurales au Pakistan et au Népal sont contraintes d'envoyer une fille chez le propriétaire terrien pour rembourser une dette existante. En Haïti, des centaines de milliers d'enfants rescapés sont exploités dans des conditions qui relèvent du travail forcé.

    Chaque année, des milliers de filles font l'objet de traite d'Ethiopie vers le Moyen-Orient. Une étude menée au Kenya, au Népal et au Pérou a montré que les enfants travailleurs migrants sont particulièrement maltraités. Aux Philippines, la plupart des jeunes filles victimes de traite des zones rurales vers Manille reçoivent la promesse d'un travail comme employée domestique, mais un grand nombre d'entre elles finissent dans l'exploitation sexuelle commerciale.

    Au Brésil, une étude portant sur 3260 enfants de 10 à 17 ans a montré que ceux qui réalisaient du travail domestique subissaient davantage de douleurs musculo-squelettiques que dans d'autres secteurs.

    Appel de Terre des hommes

    Le rapport du BIT est publié à l'occasion de la Journée mondiale contre le travail des enfants mercredi. A cette occasion, Terre des hommes a appelé la Suisse à ratifier la Convention du BIT sur les travailleurs domestiques, adoptée il y a deux ans et ratifiée jusqu'ici par huit pays.

    Terre des hommes a indiqué rencontrer, dans le cadre de ses projets pour mineurs domestiques, de nombreux cas d'exploitation, d'abus sexuels, d'actes de violence, même de décès des suites de maltraitance. En Afrique du Nord, l'organisation est témoin chaque année de la mort de «petites bonnes» qui ont quitté leur famille en zone rurale pour subvenir à leurs besoins.

     


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  • Une étude de l'OIT (Organisation internationale du travail) a évalué à 600.000 le nombre de travailleurs forcés au Moyen-Orient, appelant à créer des garde-fous pour mettre un terme à leur exploitation, notamment sexuelle, et à réformer le système de la "kafala" qui oblige la main d'oeuvre étrangère à être parrainée.

    Intitulé "Piégés et coincés: les trafics de personnes au Moyen-Orient", ce rapport de 150 pages, rédigé au terme de 650 entretiens sur une période de deux ans en Jordanie, au Liban, au Koweït et aux Emirats arabes unis, a été présenté mardi, à l'ouverture d'une conférence de deux jours à Amman de l'Organisation internationale du travail (OIT), une agence de l'ONU.

    "Si les données sont rares, l'OIT estime qu'il y a 600.000 victimes du travail forcé au Moyen-Orient", peut-on lire dans ce rapport.

     

    "L'immigration de travail dans cette région du monde est sans pareille par son ampleur et sa croissance, qui a été exponentielle ces dernières années", a souligné Beate Andrees, chef du Programme d'action pour combattre le travail forcé à l'OIT.

    "Le défi est de mettre en place des garde-fous, à la fois dans les pays d'origine et les pays de destination, pour empêcher l'exploitation et les abus dont sont victimes ces travailleurs", a-t-elle estimé.

    L'agence de l'ONU pointe du doigt la kafala, qui "gouverne les vies de la plupart des travailleurs immigrés dans les pays du Machrek et du Conseil de coopération du Golfe (CCG)", soit plus de 12 millions de personnes.

    Ce système de garant impose à chaque étranger dans ces pays d'avoir un "kafil", un ressortissant du pays hôte -souvent son employeur- qui est responsable de son visa et de son statut légal dans le pays d'accueil et dont il doit obtenir l'aval pour tout acte de la vie civile.

    Cette exigence de la kafala pose un "problème inhérent", en créant un déséquilibre de pouvoir entre l'employeur et l'employé. "Réformer le système de la kafala améliorerait beaucoup la gestion des migrations liées au travail", souligne le rapport. Les Arabes ont généralement un accès plus facile au marché du travail dans le Golfe que les migrants africains ou asiatiques soumis à la kafala, indique l'étude.

    L'étude critique les défauts des législations encadrant le travail, qui "aggravent les vulnérabilités des travailleurs immigrés", ainsi que des "lacunes significatives" dans la loi qui "restreignent la capacité des travailleurs immigrés à s'organiser, mettre fin à un contrat de travail et changer d'employeur".

    Par ailleurs, dans certains secteurs employant surtout des hommes, "des travailleurs sont régulièrement trompés concernant les conditions de vie et de travail (...) voire même l'existence d'un travail", souligne le rapport.

    Ainsi, des migrants d'Asie, dont le Bangladesh, le Népal ou le Sri Lanka, recrutés comme travailleurs domestiques, se retrouvent "à garder des troupeaux dans le désert".

    Le rapport souligne la "vulnérabilité particulière" de femmes africaines ou asiatiques "dupées et contraintes à une exploitation sexuelle". De même, des femmes, venues pour des emplois d'infirmières ou d'enseignantes, "sont enlevées à leur arrivée" et contraintes à "fournir des services sexuels à des clients dans des appartements ou des villas privés ou isolés".

    L'étude souligne aussi le poids de la dette contractée par de nombreux migrants, notamment asiatiques, envers des agences de recrutement: en moyenne 550 dollars, mais "parfois beaucoup plus", les laissant "criblés de dettes".


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  • Mise à jour des archives égyptiennes

     


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  • Eau source de vie, pas de profit !


      Avec le soutien du gouvernement français, les multinationales de l'eau tiendront un Forum Mondial de l'Eau (FME) du 12 au 17 mars 2012 à Marseille. Ce FME est, en réalité, un forum des marchands d'eau, qui se retrouvent pour discuter des modalités de la privatisation d’un élément essentiel à la vie et du contrôle de grandes firmes sur sa distribution. Face à lui se tiendra un Forum Alternatif Mondial de l'Eau (FAME) du 14 au 17 mars, organisé par Attac et de nombreux partenaires, où les acteurs des mouvements de l’eau discuteront des alternatives à la marchandisation de l’eau (voir le programme).

    Partout dans le monde, la marchandisation de l’eau par les multinationales a aggravé la crise de l’eau. Il est désormais clair que les « objectifs du Millénaire », fixés par l’ONU en matière d’eau potable et d’assainissement, ne seront pas atteints. La principale raison n’est pas le manque d’eau, mais l’accaparement, le gaspillage et l’exploitation de l'eau par les multinationales selon le principe de maximisation des profits.

    Les géants de l’eau, dont les français Suez et Veolia, privilégient systématiquement la rentabilité des investissements et les technologies fortement consommatrices, au détriment de l’accès à l’eau pour tous, qui a pourtant été reconnu comme un droit humain fondamental par l'ONU. Ils utilisent leurs réseaux d’influence et des techniques de lobbying brutales pour obtenir gain de cause auprès des gouvernements et des collectivités locales contre l’intérêt du plus grand nombre.

    Contre la marchandisation de l’eau, il existe pourtant des alternatives. Il est désormais essentiel de lutter pour la préservation de l’eau comme un bien commun de l’humanité et pour une gestion commune et publique de l’eau. Cette lutte rejoint toutes celles contre la financiarisation des ressources naturelles, qui convergeront notamment au moment du Sommet de Rio + 20 pour dire non à l'économie verte qui nous est proposée. Cette lutte est globale : partout, en France, en Italie et jusqu’en Bolivie, des luttes populaires et des alternatives citoyennes démontrent que l'emprise des multinationales sur l'eau n'est pas une fatalité. Le FAME se présente ainsi comme un lieu où ces luttes pourront converger et où s'échangeront les expériences, afin que les peuples reprennent en main leurs biens communs.

    Attac France,
    Le 12 mars 2012

     Pour rejoindre Attac : http://www.france.attac.org/adherer
    Désinscription : http://list.attac.org/wws/signoff/informons


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  • Chers amis, 



    Aujourd'hui pourrait être le jour où nous aurons sauvé l'Internet libre. Nous avons fait changer de position la Maison Blanche et le Congrès est sur la défensive.A présent, suite au blackout mené par Wikipédia, les projets de loi américains de censure d'Internet font la une des médias. Nous avons atteint le moment crucial. Enterrons le projet de loi pour de bon. Signez la pétition

    Signez la pétition
     

    Aujourd'hui pourrait être le jour où nous aurons sauvé l'Internet libre. 

    Le Congrès américain allait adopter une loi permettant aux États-Unis de censurer l'accès à n'importe quel site internet dans le monde entier. Mais après avoir remis notre pétition de plus d'1,2 millions de signatures à la Maison Blanche, nous avons conduit le Congrès à s'opposer au texte, et l'énorme pression publique amène plusieurs partisans du projet de loi à changer leur position. Le mouvement de blackout mené par Wikipédia a propulsé la campagne citoyenne à la une des médias. 

    Nous renversons le cours des évènements. Mais les partisans de la censure essaient de remettre le projet de loi sur la table. A nous de l'enterrer pour de bon aujourd'hui. Cliquez pour signer la pétition urgente pour sauver l'Internet mondial ou, si vous avez déjà signé, pour envoyer des emails, téléphoner et poster des messages sur les pages Facebook et Twitter des membres du Congrès et des entreprises clés. Puis faites suivre le message à tous: 

    http://www.avaaz.org/fr/save_the_internet_action_center_fr/?vl 

    Ce projet de loi ferait des États-Unis l'une des pires nations pratiquant la censure dans le monde -- ce qui l'amènerait au même niveau que la Chine ou l'Iran. Le projet de loi d'anti-piratage sur Internet (SOPA) et le projet de loi de protection des adresses IP (PIPA) autoriserait le gouvernement américain à bloquer chacun d'entre nous l'accès à des sites tels que YouTube, Google, ou Facebook. 

    Nous avons fait changer de position la Maison Blanche, et à présent notre campagne mondiale et la pression publique qui gonfle sont en train de contraindre le Congrès à abandonner ces projets de loi. Le week-end dernier, le Sénateur Cardin, co-auteur des textes de projets de loi, a déclaré son intention de voter contre! Puis six Républicains très en vue ont écrit une lettre demandant que les projets de loi soient abandonnés. A présent, le vote a été suspendu à la chambre des représentants.

    Il y a quelques jours, on nous avait dit qu'il était impossible de stopper la cabale des partisans de la censure, mais depuis nous avons renversé le cours des évènements et nous pourrions gagner, incroyable! Stoppons les partisans de la censure aujourd'hui. Signez la pétition urgente pour sauver l'Internet mondial et partagez-la avec tous vos contacts

    http://www.avaaz.org/fr/save_the_internet_action_center_fr/?vl 

    Cette législation américaine pourrait porter atteinte à l'ensemble de nos libertés. Mais si nous gagnons, nous allons montrer que lorsque les citoyens s'unissent d'une seule et même voix partout dans le monde, nous pouvons partout arrêter les abus de pouvoir. Nous avons mené ce projet de loi au bord du précipice. Amplifions notre appel aujourd'hui, et ainsi nous pourrons mettre un terme à la plus grande menace de censure d'Internet que le monde ait connu. 

    Avec espoir, 

    Dalia, Ian, Alice, Ricken, Diego, David, et toute l'équipe d'Avaaz 

    Sources:

    Déclaration de la Maison Blanche (en anglais):
    https://secure.avaaz.org/whitehouse_internet_statement

    Loi antipiratage aux Etats-Unis: Wikipédia et Google font écran noir pour protester (L'Express):
    http://www.lexpress.fr/actualites/1/economie/loi-antipiratage-aux-etats-unis-wikipedia-et-google-font-ecran-noir-pour-protester_1072602.html

    Sous pression, Go Daddy retire son soutien à la loi anti-piratage SOPA (Numérama):
    http://www.numerama.com/magazine/21057-sous-pression-go-daddy-retire-son-soutien-a-la-loi-anti-piratage-sopa.html

    Obama ne soutiendra pas la loi anti-piratage SOPA (L'expansion):
    http://lexpansion.lexpress.fr/high-tech/obama-ne-soutiendra-pas-la-loi-anti-piratage-sopa_278703.html

    Blackout sur l'internet américain (Owni):
    http://owni.fr/2012/01/18/black-out-sopa-pipa-wikipedia-internet-americain/

    Les grandes lignes de la loi SOPA (en anglais): 
    http://americancensorship.org/infographic.html

    Loi antipiratage américaine: RSF ferme son site en anglais en signe de protestation (AFP):
    http://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5g7R9Pyz1UUITVLgaLPngxPsrWryg?docId=CNG.273c387597a44eab92d09f9da665ad1e.9d1

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  • Pôle Emploi : numéro unique, erreurs multiples !

    Elisabeth Matheu-Cambas - Tribune (Marianne2 ) | Dimanche 27 Novembre 2011
       « Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage ». Pas toujours, et surtout pas au Pôle emploi. Dans un témoignage très personnel mais très significatif, ELisabeth Matheu nous raconte ses tribulations lors de son inscription au chômage. QUI ont dû arriver à bien d'autres personnes !




    S’il vous est arrivé, dans votre carrière, d’être licencié, d’avoir votre CDD non renouvelé, de partir en retraite anticipée, d’être en reconversion professionnelle ou encore d’être jeune diplômé, bref de vous retrouver, à un moment ou à un autre, sans emploi, vous avez sûrement eu affaire à l’ANPE, appelée depuis quelques années, Pôle Emploi. Même si votre passage à Pôle Emploi a été de courte durée, vous avez probablement vous aussi quelques anecdotes ubuesques, plus drôles à raconter qu’à vivre !
     
    Quelques conseils pour les futurs « polemploistes »... Ne tardez pas à vous inscrire ! Dès que votre dernier employeur vous remet votre feuillet Assedic, le 31 mars par exemple, précipitez-vous dès le 1er avril au Pôle Emploi le plus proche (évitez les blagues potaches du jour, ce n’est ni le lieu ni le moment !)  afin d’effectuer votre préinscription. Là-bas, c’est assez simple, vous avez juste besoin de composer un numéro unique, une personne vous convoquera à un premier rendez-vous qui fera office d’inscription. C’est presque trop simple pour être vrai ! Si jusque là tout s’est bien passé, ne criez pas victoire. Pôle emploi est plein d’embûches. Si vous avez été rapide, n’attendez pas autant d’efficacité du côté de Pôle Emploi, le délai peut être long, voire très long, assez long pour finalement retrouver du boulot (par vos propres moyens)!
     
    Si ce n’est pas le cas, armez-vous de patience, de courage et ouvrez grands vos oreilles ! Les informations que vous recevrez pourront être contradictoires. Si vous n’êtes convoqué que le vendredi 23 avril au Pôle Emploi X, c’est normal ! Vous n’êtes pas le seul à chercher du travail ! Si entre temps, le jeudi 8 vous recevez un courrier qui vous annonce que vous êtes convoqué le lendemain (le 9 donc) mais au Pôle Emploi Y, pas d’inquiétude. Un petit coup de fil... ah ! Mais pas le jeudi a-midi, Pôle Emploi est fermé ! Si votre courrier est arrivé vers midi voire 13h, il sera trop tard pour appeler. Le 9 au matin, vous appellerez- vous sentant presque coupable- pour comprendre pourquoi vous êtes convoqué à deux endroits différents deux jours différents pour faire UNE et UNE SEULE inscription. Une personne très sympathique tentera d’élucider votre problème et finira par vous rassurer, vous n’avez pas à vous présenter le 9 au Pôle Emploi Y, c’est une erreur ! Ouf ! Par contre le Pôle Emploi X, où vous êtes convoqué le 23 avril, c’est aussi une erreur ! Parce que ce que vous ne saviez pas, « c’est que vous dépendez du Pôle Emploi Y au niveau administratif et du Pôle Emploi X pour votre suivi » (?!?) et la personne sympathique à l’autre bout du téléphone vous interdit de vous présenter le 23 avril au Pôle Emploi X, sous peine de vous faire jeter ! Il vous donne donc un nouveau rendez-vous, cette fois le 29 au Pôle Emploi Y, pour faire l’inscription.

    Allez plus que 20 jours ! Et en attendant, faudra manger des nouilles et privilégier la marche à pied.
    Ponctuel, vous vous présentez au Pôle Emploi Y le 29 avril avec tous les papiers nécessaires : votre dossier, votre CV à jour...pas question d’oublier une pièce, ça pourrait retarder votre inscription( !)

    Pas de doute, vous n’êtes pas le seul demandeur d’emploi. La file d’attente est interminable !!!! « On est tous convoqués à 8h30 ou quoi ? » Vous ne saviez pas que Pôle Emploi organisait des speed dating. On vous fait patienter, vous êtes reçu assez vite, et par curiosité vous tentez d’en savoir plus sur cette histoire « alors, il paraîtrait que je dépends de deux Pôle Emplois... »La femme, surprise, vous redemande votre adresse et après avoir tapé sur son ordinateur, elle vous regarde droit dans les yeux et tranche en vous informant que vous dépendez du Pôle Emploi le plus proche de votre domicile en l’occurrence le Pôle Emploi Z !!! 

    Vous comprenez donc que vous n’êtes pas au bon Pôle Emploi pour l’inscription ! Peut-être est-ce de l’agacement, de la colère ou de l’incompréhension qu’elle lit sur votre visage, mais très vite elle vous propose de faire « quand même » l’inscription « puisque vous êtes là ». Et bien, oui, on va plutôt faire ça ma petite dame, il ne manquerait plus qu’elle refuse l’inscription et qu’elle vous donne un autre rendez-vous, et pourquoi pas le 25 décembre ? Entre la dinde et la bûche vous pourrez toujours vous libérer (à moins que le 25 ne soit un jeudi !). Non, elle vous assure, à la fin de l’entretien qu’elle transférera votre dossier au Pôle Emploi Z, dans les plus brefs délais. Vous sortez de là, avec une seule pensée en tête, c’est quand même une sacrée pagaille chez eux ! Enfin, ça s’est fait. Il ne reste plus qu’à vite retrouver du travail pour sortir de ce panier de crabes.

    Vous ne savez toujours pas quand vous toucherez vos indemnités ni combien mais, patience ! Maintenant vous en avez la certitude, Pôle Emploi va s’en charger au plus vite !
    Quelques jours plus tard, vous recevez (dans votre boîte aux lettres) un courrier de Pôle Emploi, vous pensez que votre dossier a été traité avec rapidité (vous avez été mauvaise langue, quand même...) et qu’on vous informe du montant de vos indemnités. En ouvrant l’enveloppe, vous découvrez un dossier d’inscription vierge envoyé par le Pôle Emploi Z (dossier que vous avez déjà reçu 2 fois en 1 mois, que vous avez rempli et déposé au Pôle Emploi Y). Et là, vous pétez les plombs !  Vous attrapez votre téléphone, et vous avez juste envie de savoir si on ne se moquerait pas un peu de vous.... voire plus si affinités !!!

    Une illustre inconnue vous répond et vous conseille de jeter le document en question. « Ah bon ? Mais qui me dit que vous ne racontez pas n’importe quoi ? Si je le jette et qu’il ne fallait pas ? Si finalement mon inscription n’a pas été validée ? » Le ton monte, enfin surtout de votre côté, peut-être perdez-vous patience ? Vous avez juste envie d’avoir des garanties et vous demandez à votre interlocutrice son nom, juste au cas où ce qu’elle vous conseille de faire soit complètement faux, que vous puissiez expliquer à la énième inconnue du numéro unique, que c’est Madame Machin qui vous a dit de jeter le courrier. Bref...elle refuse en bloc, et vous explique  « qu’elle n’est pas habilitée à le faire ». « A mon avis, il n’y a pas que pour donner votre nom que vous n’êtes pas habilitée...Et pourquoi ne pouvez-vous pas me donner votre nom ? Vous avez le mien, vous avez mon adresse et tout mon pedigree sauf peut-être la radio de mes dents de sagesse et le petit nom de ma belle-mère ! Vous avez peur de quoi ? D’être incompétente ou de ne pas assumer une éventuelle erreur ? » Elle finira par vous donner son prénom (la belle affaire !) n’insistez pas ! De toute façon, la pauvre n’y est pour rien. Elle n’a sûrement pas choisi que le système soit celui-là, elle n’est pas responsable des dysfonctionnements de Pôle Emploi. Elle est juste la 4ème interlocutrice  de cette histoire...sans fin !

    Vous finirez par jeter le dossier. Suspendu à votre écran d’ordinateur, vous naviguez entre le site du Pôle emploi et d’autres sites à la recherche d’un emploi. Un œil sur votre dossier « en cours de validation ». Et puis, un jour vous aurez le montant de vos indemnités journalières qui apparaîtront sur votre écran. Attention ! Ce n’est qu’à titre d’information, il faudra encore attendre quelques jours pour le paiement. Quand finalement, vous découvrez le 17 mai que vous percevrez moins que ce qu’ils annonçaient précédemment, vous vous rendez au Pôle Emploi Z (celui dont vous dépendez) pour avoir un visage et un nom quand vous poserez votre question ! On vous explique qu’ « il y a 7 jours de carence à compter de la préinscription ». Pas de soucis, mais personne ne vous l’avez encore dit.« Et comptez encore quelques jours pour avoir l’argent sur votre compte. » Vous n’êtes plus à quelques jours près !

    Le 23 mai c’était Noël ! Enfin pas longtemps...à peine le montant de vos indemnités s’affichaient en crédit, que votre solde lui s’affichait en négatif ! Un certain découvert, creusé par le temps qui passe, par les erreurs qui s’accumulent...
    Allez, ne vous découragez pas ! Il y a toujours pire, n’est-ce pas ? Le mois prochain, ça ira mieux sauf si entre temps Pôle Emploi vous radie par erreur parce que vous ne vous êtes pas présenté à un entretien où on avait oublié de vous convoquer !

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  • Viols en temps de guerre,sous la direction de Raphaëlle Branche et Fabrice Virgili,

    Payot, 20 €. En librairies le 2 novembre 2011.  270 p.

    Ce livre pionnier éclaire la place et le sens de la violence sexuelle et sexuée dans les violences de guerre.

    TABLE : Introduction (R. Branche, D. Palmieri, I. Delpla, J. Horne. P. Lagrou, F. Virgili).- Le viol dans les codes militaires russes, de Pierre le Grand à l’Armée rouge (M.G. Muravyeva).- Le crime indiscutable : la violence sexuelle des soldats allemands pendant la « guerre d’anéantissement » en Union soviétique (R. Mülhaüser).- La victimisation du corps et la politique du corps : viols et abus sexuels pendant la guerre civile grecque (K. Stefatos).- Héroïnes de guerre et hommes oubliés de la guerre de libération du Bengladesh (N. Mookherjee).- Viol, blâme et contrôle social : le cas des enclaves paramilitaires en Colombie (N. Suarez Bonilla).- Une fureur « belgica » en Rhénanie occupée ? (A. Godfroid). Pratiques de guerre, terreur et imaginaires : troupes maures et viols durant la guerre d’Espagne (M. Joly).- Promettre le viol : milices privées contre guérilla maoïste dans l’État du Bihar, Inde (A. Soucaille).- Le poids des imaginaires : viols et légendes des femmes snipers en Tchétchénie (A. Regamey).- Lever le silence : nouvelles approches des conséquences du viol – Érythrée, RD Congo, Rwanda, Somalie, 1994-2008 (N. Puechguirbal).- Le tabou n’est pas celui qu’on croit : l’historienne, le viol et la société israélienne (T. Nitsan).- Le « visage laid de la guerre » : la stigmatisation des enfants nés de viols au Nigéria (A.D. Ikuomola).- Décisions spéciales : les enfants nés des viols allemands et abandonnés à l’Assistance publique pendant la Grande Guerre (A. Rivière).- Russes et Allemands : viols de guerre et mémoires postsoviétiques (N. Naimark).
    Fabrice Virgili, historien, chargé de recherche au CNRS (IRICE/université Paris 1), est l’auteur de La France « virile » : des femmes tondues à la Libération (PBP nº 502) et Naître ennemi : les enfants de couples franco-allemands nés pendant la Seconde Guerre mondiale (Payot, 2009). 

    Viols de guerre ou le temps des soudards

    Georges Vigarello pour Marianne | Dimanche 6 Novembre 2011

    L’historien Georges Vigarello a lu pour « Marianne » « Viols en temps de guerre », ouvrage collectif paru le 2 novembre. De l’ex-Yougoslavie à la Colombie, une terrible série d’études sur les stratégies militaires du viol à travers le monde.

    Dans ses Dames galantes, au XVIe siècle, Brantôme évoque le viol en temps de guerre comme étant une conséquence quasi normale de la conquête : occupation du « territoire », appropriation massive du féminin par le masculin, corps des femmes envahis comme l’est la terre. Le geste de possession est geste de pénétration. Il inclut le sexuel sans que les faits souffrent généralement de longs commentaires. Brantôme conduit même à l’extrême un très banal fantasme de dominateur : « Elles aiment les hommes de guerre toujours plus que les autres et leur violence leur en fait venir plus d’appétit. »

    Une longue histoire existe qui tolère l’acte comme une « évidence », alors que le juriste et philosophe Hugo Grotius, dans son Droit de la guerre et de la paix, au XVIIe siècle, insistait pourtant sur le fait que « violer les filles » en temps de guerre ne saurait « demeurer impuni ». La force, traditionnellement, l’a ici sourdement emporté sur le droit. Le livre collectif que publient aujourd’hui les éditions Payot, Viols en temps de guerre, sous la direction d’historiens chevronnés, reprend le thème. Ce qui permet tout d’abord d’approcher l’horreur, c’est de constater l’insoutenable.

    Cette scène entre autres, en 1945, évoquée par un soldat soviétique, après qu’un convoi de civils allemands en fuite a été attaqué, et après qu’un groupe de femmes en a été « séparé » : « Les femmes, les mères et leurs filles se tenaient de chaque côté de la route, devant chacune d’elles se tenait une file hurlante d’hommes, le pantalon baissé. » Ou cette scène encore en Tchétchénie, rapportée en 1999 : « On a attrapé une sniper ensuite on lui a fourré une grenade dans le vagin, on l’a dégoupillée et on s’est enfui en courant. Elle a été déchiquetée. »

    La première étude du genre

    L’intérêt majeur de ce livre ne tient pourtant pas à l’horreur évoquée. Il tient d’abord à sa nouveauté : il s’agit de la première étude du genre. Elle doit être saluée comme telle. Elle doit aussi être commentée. C’est qu’elle correspond à un changement de culture. Le féminisme a aidé à ce que de tels actes apparaissent plus que jamais dans leur inhumanité. Il a aidé à ce que le viol soit l’objet d’une visibilité qu’il n’avait pas, rendant évidentes les revendications des femmes sur l’absolue propriété de leur corps, faisant basculer définitivement le viol dans la barbarie.

    Autre changement de culture, les types d’études consacrées à la guerre. Longtemps cantonnées au triptyque « militaire-politique-diplomatique », longtemps centrées sur les plans de bataille, les types d’armements, les attaques, les défenses et leurs effets, ces études sont aujourd’hui bouleversées, s’attachant aux dimensions sociales, culturelles et de genre des conflits, s’attardant aux sensibilités, au quotidien des agresseurs et des agressé(e)s.

    De telles études ont basculé du milieu technique au milieu humain, des matériaux militaires aux effets de conscience et aux modes de vie. L’histoire, avec elles, s’est donné d’autres objets : affects et traumas ne sauraient être tus, douleurs et vulnérabilités ne sauraient être ignorées. C’est dans un tel cadre que le viol en temps de guerre peut être interrogé comme il ne l’avait jamais été jusque-là.

    Le viol comme une entreprise quasi stratégique 

    L’autre intérêt majeur de ce livre est de s’éloigner du cliché. Loin de s’en tenir à la simple domination sans âge du masculin sur le féminin, loin de s’en tenir à la seule prise en compte de pulsions ravageuses, les travaux s’aventurent sur bien d’autres terrains, se livrent à bien d’autres interrogations, multiplient avec pertinence les situations et les cas.

    Rien de plus contestable alors, ou partiel, que de limiter le thème à quelque universel de la domination sexuelle. Rien de plus abrupt et simplificateur aussi que la vieille vision de Brantôme et ses « invasions » territoriales.

    L’originalité est ici de décrire le viol comme une entreprise quasi stratégique, et non plus seulement pulsionnelle, visant les vaincu(e)s. Ce que les viols dans les conflits de l’ex-Yougoslavie avaient du reste déjà clairement montré, centrés sur les filiations et les ethnies. D’où l’importance donnée à la spécificité que chaque environnement local ou historique peut représenter. D’où la diversité des thèmes proposés.

    Ces textes montrent combien les viols en temps de guerre, loin d’être cantonnés à la seule « jouissance sexuelle », participent tous aux versants les plus variés d’une « domination sociale, ethnique ou nationale ». Le contexte du conflit fait alors aussi le contexte du viol.

    L’acte peut ne pas viser seulement les femmes

    A commencer par le fait que l’acte peut ne pas viser seulement les femmes. La très belle étude de Nayanika Mookerjee sur les conflits du Bangladesh s’attarde sur un trait spécifique de l’opposition entre le Pakistan oriental et le Pakistan occidental. Partage « curieux » et « contestable » en 1947, d’abord, après l’indépendance de l’Inde. Le Pakistan oriental (le Bengale) et le Pakistan occidental sont constitués en pays unifié, alors qu’ils sont séparés géographiquement et largement différents culturellement. Seule « unité » ici, l’islam. Encore s’agit-il d’un islam disparate où les Bengalis sont accusés de pratiquer une religion trop « hindouisée », « impure », révélant une certaine faiblesse sinon même une efféminisation.

    Suit une domination du Pakistan occidental sur le Pakistan oriental, une quasi-colonisation aussi, une « stratégie vigoureuse d’assimilation » jusqu’à l’emprise de la langue, le bengali étant interdit au bénéfice de l’ourdou, langue du Pakistan occidental. Suivent encore les révoltes des Bengalis en 1971, la guerre, la proclamation d’une république populaire du Bangladesh, la répression enfin. Suivent surtout les viols des hommes musulmans bengalis perpétrés par les militaires ouest-pakistanais « en représailles aux attaques de la guérilla bengalie ».

    Viols d’hommes donc que de sourdes références à la religion et aux ethnies prétendent expliquer : « Les musulmans bengalis déjà suspectés d’être féminisés devaient confirmer leur identité musulmane par un processus qui les féminisait davantage : le viol. » Acte d’humiliation clairement spécifique où l’enjeu tient ici « à une féminisation et à une catégorisation raciale des hommes », l’acte sexuel prenant alors son sens dans une sédimentation toute particulière mêlant genre, culture, histoire, religion : jeu subtil où l’humiliation se fait multidimensionnelle. Le viol des Bengalis est au cœur d’une stratégie.

    Le viol au service d’un ordre politique et social

    Stratégie encore, toute différente cette fois, dans la guerre civile colombienne, où les milices paramilitaires tentent d’instaurer un ordre dans les régions « reconquises » et dominées. Humiliations sexuelles et viols y jouent un rôle décisif. Ils sont ciblés, visant, parmi les femmes, celles qui manifestent le moindre signe de « transgression », celles qui témoignent d’une quelconque résistance, celles qui cultivent leur féminité ou « laissent apparaître des parties de leur corps ».

    D’où l’instauration d’un climat permanent de peur diffuse, l’obtention de la conformité par la terreur, l’imposition d’un ordre intime échappant à la sphère privée. Aucun choix pour les victimes : « En dehors de la fuite, toute résistance paraît impossible. » La perversité du dispositif est qu’il trouve une complicité dans la culture elle-même. La puissance du patriarcat traditionnel, parvient à favoriser indirectement la stratégie des paramilitaires dans ces régions de la Colombie : « Les sanctions envers les femmes, notamment celles qui transgressent l’ordre par leur conduite, trouvent une certaine approbation collective. »

    Ce viol en temps de guerre civile, loin, une fois encore, d’être simple pulsion, est ici mis au service d’un ordre politique et social. Plus encore, la violence sexuelle des paramilitaires colombiens finit par trouver une « légitimité » dans le système social et culturel lui-même.

    Une souffrance enfouie

    Stratégie enfin, dans une autre guerre civile, celle de la Grèce à la fin des années 40. Une guerre où les femmes avaient pu trouver quelque affirmation personnelle et politique, celle-là même que l’Etat leur refusait jusque-là. C’est sur les combattantes ou les résistantes emprisonnées qu’une violence sexuelle s’est alors exercée, avec une intensité croissante, jusqu’à adopter des formes « clairement organisées » : scènes de terreur nocturne, femmes enlevées dans le noir absolu, tortures par les officiers de police, menaces de viol par des hommes infectés par la syphilis.

    La domination prenait une forme précise et circonstanciée : renvoyer dans le domaine « privé » des femmes ayant tenté une action et une affirmation dans le domaine public, briser la revendication d’un statut nouveau et autonome du féminin. Viol sans aucun doute, mais aussi « intimidation politique par la victimisation sexuelle des dissidentes ».

    Reste la question des « suites », celle des malheurs et des traumas. Celle des enfants nés de viols en tout premier lieu, qu’avait déjà remarquablement étudiée Stéphane Audoin-Rouzeau dans l’Enfant de l’ennemi en 1995. Plusieurs analyses s’étendent ici sur l’infernale intrication psychologique du problème : l’assimilation sociale et collective toujours troublée de l’enfant, la sensibilité déchirée de la mère, le sentiment paradoxal à l’égard de cet enfant fait de proximité et de rejet, la politique de son abandon aussi mise en place par le gouvernement français durant la Première Guerre mondiale.

    C’est sur la souffrance enfin que s’étendent quelques textes majeurs : question d’une profondeur inédite dont les psychologues ont su montrer aujourd’hui la redoutable ampleur. La nécessité pour la femme de « parler » par exemple, alors que nombre de cultures s’y opposent. La nécessité encore de lutter contre la manière dont les victimes peuvent minorer les épreuves subies. Immense travail personnel et collectif où l’objectif de se reconstruire vient en permanence buter contre la destruction intime que le viol en temps de guerre a très consciemment et très « stratégiquement » provoquée.

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