•  A l’écoute de sa voix, de son corps et de la planète, la jeune artiste a fait du développement durable un de ses chevaux de bataille. Une préoccupation à l’œuvre dans sa vie comme dans son dernier disque. La chanson française respire. 

    Camille, l’écolo à travers chant

     "Le plus beau bisphénol », du « plomb », des « OGM », du « dioxyde de carbone »… C’est le cocktail offert par Camille dès la première chanson de son nouvel album, Ilo Veyou, sorti en octobre dernier. « Vous voulez que je mette votre téléphone en “mode avion” ? Je n’en ai pas à cause des ondes mais ça, je sais le faire. » Ça, c’est l’une des premières phrases prononcées par la chanteuse, lorsque l’interview commence, dans un café près de la Maison de la Radio, à Paris. On était venu voir la jeune mère, intrigué par quelques déclarations estampillées « développement durable ». La voilà qui se présente sous son versant « principe de précaution ». Une démarche calculée ? Un créneau porteur quand les actrices investissent le champ des robes en coton bio et les sportifs celui des « vagues qui rendent humble » ? Raté. La chanteuse n’a rien de ces people qui s’affichent en vert mais prennent des jets privés comme d’autres le TER, qui sont prêts à tout pour « sauver le planète »… du moment que ça ne change pas leur vie.

    Non, Camille, indéniablement, maîtrise son sujet écolo sur le bout des doigts. Même si elle le nie : « Tout le monde s’y connaît à partir du moment où on est des organismes vivants. On fait partie d’un microcosme, d’un écosystème. Il faut commencer par soi. » Jeremiah, ami et réalisateur de ses vidéos depuis quatre ans, ne dit pas autre chose : « Elle est très à l’écoute d’elle-même. Elle est originale au sens premier : elle revient aux origines. »

    Son abandon du téléphone est symptomatique : « Jusqu’à 20-25 ans, j’avais mal à à la tête, à l’oreille. Je me suis interrogée, renseignée et j’ai arrêté le portable. » Depuis, elle s’est penchée sur l’influence des micros HF qu’elle utilise sur scène. D’elle-même jusqu’au monde, elle fonctionne par cercles concentriques. Alimentation bio, emballages, circuits courts : « Il s’agit de voir quelle portée ont les choses, de connaître son environnement. » Elle cherche désormais à organiser ses prochaines tournées – des « catastrophes écologiques » – de manière différente : prendre le train, éviter les grandes chaînes hôtelières et leur « faux luxe ».

    Le souffle au corps

    Mais après dix ans de carrière et quatre albums studio, Camille ne s’est pas muée en militante. D’ailleurs, même si elle apprécierait que « les écolos gagnent les élections », elle estime que « ce sont les industriels qui ont le pouvoir ». Elle est une fois pour toutes chanteuse. Une de celles qui se souviennent que la voix est le tout premier instrument. Alors elle expérimente : onomatopées, plongeons dans les graves, décollages vers les aigus. Sur disque comme sur scène, Camille, c’est surtout un souffle au corps, chevillé. Inimaginable dans une production grand public toujours plus aseptisée, ses chansons font exister les respirations. On entend sa bouche, ses lèvres, sa glotte, sa gorge. La redécouverte de sa voix date de ses – brillantes – études : hypokhâgne au lycée Henri-IV, Sciences-po.

    « Il y a quelque chose de très compétitif, il y a une violence dans cette scolarité à la française, très cérébrale. » Le chant, lui, remplit tout autant l’esprit et parle au corps, explique celle qui, comédienne aussi, n’hésite pas, entre deux réponses, à faire quelques étirements calculés, à tordre son cou pour le reposer. En 2002, son premier album la met sur orbite mais c’est le suivant, Le Fil, qui l’installe, trois ans après, comme une artiste qui compte. Près de 500 000 exemplaires vendus et un concept limpide : des chansons presque a cappella, posées sur un long bourdonnement, qui s’étend pendant plus de trente minutes. Un disque aérien et aéré.

    « Aujourd’hui, à la radio, le son est décentré, compressé. On peut faire une analogie avec le compost. Comme la musique, il a besoin d’air, sinon la terre devient stérile. » Camille n’a pas peur de taper sur l’industrie du disque – « masculine » – quand son art serait, lui, féminin, « comme la terre », dit-elle, faisant siennes les positions de Coline Serreau dans son dernier film, Solutions locales pour un désordre global, qu’elle a vu et apprécié. Pour autant, elle accepte et assure, bon an mal an, ses obligations professionnelles de promo.

    Elle flirte aussi avec un rien de cabotinage, quand elle se lance, sous l’œil complice d’une caméra, dans un petit numéro du duettistes avec le chanteur Charlie Winston, passé par hasard en pleine interview. Elle assume ses contradictions car « le paradoxe est vital ». Après tout, « les villes ou les aires d’autoroute sont parmi les lieux où il y a le plus de biodiversité ! »

    Chorale d’enfants rigolards

    Mais attention, dans Ilo Veyou, il n’y a pas que de l’air. Il y a aussi des ballades poignantes – « Wet Boy » et ses échos de Joni Mitchell –, du R’nB minimaliste… et beaucoup d’humour. Chorale d’enfants rigolards, tordante parodie de chanteuse réaliste : on peut franchement rire à écouter Camille. « Sur disque, je m’amuse à en faire plus avec moins. » Elle souhaiterait d’ailleurs que l’aspect épicurien, jubilatoire ne soit pas oublié par les écologistes. Une dernière anecdote racontée par Jeremiah : « En ce moment, je suis en train de monter une vidéo d’un concert dans une Fnac, où elle essaye de convaincre les gens de ne pas prendre de sacs plastique à la caisse… Et ça ne marche pas du tout ! », se marre-t-il franchement. Dans ses chansons, comme dans ses combats, Camille ne manque pas d’air. Tant mieux.

      Le rédacteur :  François Meurisse

        Chef d’édition  terraeco.net

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  • le 24 janvier 2012 sortie du quadruple album pour l’anniversaire d’Amnesty International

    Les artistes se mobilisent pour les 50 ans d’Amnesty International

    jeudi 26 janvier 2012, par Laura Leprêtre

    Johnny Cash, Adele, Queens of the Stone Age, Patti Smith, Sting, Diana Krall, Mark Knopfler, Lenny Kravitz, Miley Cyrus, Joan Baez, Marianne Faithfull, Pete Seeger, Bryan Ferry, Cage the Elephant, Maroon 5, Seal et plein d’autres se sont retrouvés pour honorer les 50 ans d’Amnesty International !

    Les artistes du monde entier se mobilisent pour Amnesty International ! Au total 80 chanteurs du monde entier interprètent dans un coffret de 4 disques des reprises de Bob Dylan sous le titre Chimes of Freedom : Songs of Bob Dylan Honoring 50 Years of Amnesty International.

    Ce quadruple album est sorti le 24 janvier 2012, tous les bénéfices de cet album seront reversés à Amnesty International. Cet opus est aussi un bel hommage au grand Bob Dylan.


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  •  04.02.2011       Le "Greenpeace de la finance" est en marche 

         A l’initiative de Pascal CANFIN (Europe écologie- Les Verts), une vingtaine de députés européens ont signé un appel pour la création d’un « Greenpeace de la Finance ». La nouvelle ONG, qui s’appelleraFinance Watch, prend peu à peu forme. Une réunion s’est tenue au Parlement européen le 3 février avec les ONG intéressées. « Dans la deuxième quinzaine de mars, nous devrions pouvoir publier la liste des membres fondateurs, explique Thierry Philipponnat, chargé du projet. Notre objectif, c’est d’être opérationnels cet été ».

        Sophie Auconie, députée européenne (Nouveau Centre-PPE) et signataire de l’appel, revient sur cette démarche.

    auconie.jpgLe Nouvel Observateur.- Pourquoi avez-vous signé l'appel à la création de Finance Watch ?

       Sophie AUCONIE.- C'est mon collègue député européen Pascal Canfin qui m'a parlé pour la première fois de cet appel visant à développer un point de vue supplémentaire face à celui des principaux opérateurs des marchés financiers. J'ai signé rapidement cet appel car en matière de règlementation des marchés financiers, nous devons prendre en compte les messages de l'industrie bancaire et financière, bien entendu, mais nous aimerions également avoir le point de vue d'une association représentant la société civile.

         N.O.-Qu'attendez vous de cet organisme ?

       S. AUCONIE.- J'en attends tout simplement une capacité à émettre un avis nouveau sur la règlementation des marchés financiers. En tant que parlementaires européens, nous recevons beaucoup de prises de positions des différents acteurs concernés par la législation que nous adoptons. Tant mieux, car elles nous aident à faire des choix politiques en connaissance de cause. Plus ces prises de positions sont nombreuses et diverses, mieux nous mènerons l'assainissement des marchés financiers au niveau européen.

        N.O.- A quelles occasions avez vous pu constater le déséquilibre entre le lobbying des professions financières et celui des autres parties prenantes (consommateurs, PME, ...) ?

        S. AUCONIE.- En regardant mon agenda ! Il est évident qu'aujourd'hui sur ces sujets, les professions financières sont plus présentes et nous sollicitent plus régulièrement que les organismes représentant la société civile. Ma porte est ouverte à tous ceux qui sollicitent un rendez-vous car je suis demandeuse et curieuse d'écouter tous les points de vue dans ce domaine.

        Propos recueillis par S.F. 

     Bienvenue sur le site de Finance Watch 
     
         En juin dernier, des élus européens en charge de réglementer les marchés financiers et les banques ont lancé un appel à la société civile pour qu'elle crée une organisation non gouvernementale capable de développer une contre-expertise sur les activités menées sur les marchés financiers par les principaux opérateurs (banques, compagnies d'assurance, hedge funds, etc.).

        L'appel des députés européens a pris le nom de Finance Watch. Son objectif: mettre fin à l'asymétrie entre la puissance de l'industrie financière et l'absence de lobbying des ONG dans le domaine de la finance constituent un problème démocratique.

     

        Les premiers signataires ont depuis été rejoints par près d'une centaine d'autres députés européens, mais également des élus nationaux et régionaux de plusieurs pays de l'Union européenne. Vous pouvez retrouver la liste des signataires sur le site.

                  Finance Watch prend de l'ampleur!

        2010 a été l'année de l'appel, 2011 sera celle de la naissance de Finance Watch, pôle européen d'expertise, de communication et de lobbying pour faire contre-poids aux banques. 

     

        Depuis le lancement de l'appel, plusieurs étapes ont été franchies pour donner du contenu à Finance Watch. A Paris, Bruxelles, Berlin, plusieurs réunions ont été organisées entre des députés européens signataires et des associations, ONG européennes, syndicats, think tanks, universitaires pour discuter les problèmes liés à ce déséquilibre. Ces réunions ont permis de partager des analyses et surtout discuter des propositions concrètes pour en sortir. 

       Une mission d’étude financée  par des députés européens et la Fondation pour le Progrès de l'Homme a permis d'avancer sur la charte des missions et des valeurs de Finance Watch, de définir les règles de son organisation et de son financement. 

     

               Participez à Finance Watch

     

        Finance Watch se construit étape par étape, et vous pouvez y participer en soutenant l'association lorsqu'elle sera formellement créée. Vous pouvez laisser vos coordonnées sur le site:

                 www.finance-watch.org 


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  • Jean-Paul Brighelli - Blogueur associé (Marianne2) Dimanche 22 Janvier 2012 

    Jean-Paul Brighelli est professeur de Lettres. Face aux propositions des candidats à l'élection présidentielle de 2012 concernant l'éducation, le blogueur synthétise dix solutions envisagées par ses collègues.

    10 propositions d'enseignants pour l'éducation
    La démocratie étant le pire système à l’exclusion de tous les autres, il m’a paru temps, à moins de trois mois du premier tour, de prendre vraiment le pouls de la profession, sans attendre des candidats des illuminations sur un métier — le nôtre — dont ils ignorent à peu près tout, sauf ce qui s’en dit au café du Commerce.

    J’ai donc lancé sur un forum fréquenté par de très nombreux enseignants, de la maternelle à l’université, une enquête sur les propositions que nous attendrions de politiques intelligents et audacieux — exemple type de double oxymore. « Le bon sens du maraud quelquefois m’épouvante », comme disait Piron : les réponses de nos collègues, pour variées qu’elles semblent à première lecture, se recoupent toutes — en dix propositions. Les voici — cum commento, comme on disait jadis, quand on faisait du latin et non des TICE, des TPE et de l’ECJS — au lieu de faire de l’histoire et de la géographie.
    Que ce soit bien clair : même si j'approuve l'essentiel de ce qui suit, je ne le contresignerais pas sans examen. Je me fais juste le petit rapporteur des désirs.

    Une remarque enfin en passant. Pour l’essentiel, ces propositions recoupent le programme de Bayrou. Mais je n’empêche pas le PS, qui mouline dans la choucroute, ou l’UMP, qui patine dans le yaourt, de s’en inspirer. Les Verts, comme on sait, sont irrécupérables. Quant au FN, il se pare des plumes du paon en se faisant le chantre de l’école républicaine — jusqu’à ce qu’on s’aperçoive que sous le plumage dont il s’habille, la volaille est déjà plumée, le chèque-éducation en place et le privé confessionnel aux commandes.

    Dix propositions

    1 - Consacrer au moins 50 % du temps, en primaire, à l’apprentissage du français — ce qui suppose une réécriture complète des programmes. Et à ce titre, privilégier les méthodes d’apprentissage alpha-syllabiques. À ceux qui se demanderaient encore pourquoi, une seule réflexion de bon sens : outre le fait que c’est le mouvement naturel de la langue, qui va du simple au composé, nous passons de plus en plus de temps sur des claviers, où l’on ne tape pas des mots, mais des lettres et des suites de syllabes — étonnant, non ? Une expérimentation comme celle du SLECC a si bien prouvé son efficacité que le ministère, jamais à court d’erreurs, vient de sucrer la maigre subvention qui permettait de diffuser les très efficaces méthodes mises en place dans ce cadre.

    2 - Mettre au feu les livrets de compétence, et autres fariboles chronophages — la réunionnite aiguë, par exemple, qui frappe de la maternelle à l’université. Tant qu’à faire, en revenir aux notes, aujourd’hui bannies du primaire. On s’étonne que dans la même logique la rue de Grenelle n’ait pas songé à faire interdire les thermomètres dans les hôpitaux.

    3 - Penser le nombre d’élèves par classe en fonction de la réalité du terrain (30 élèves décents, ça se gère, 12 élèves en difficulté, ça se gère aussi) (1). Cela suppose d’oser enfin clairement des classes de niveau. Les « moyens » ne se distribuent pas uniformément, mais en fonction des besoins. Là aussi l'égalitarisme a tué — particulièrement ceux qui étaient moins égaux au départ.

    4 - La remise en cause radicale du collège unique consisterait aussi à proposer une orientation positive en filière professionnelle dès la quatrième pour tous ces élèves qui s’ennuient si ostensiblement au collège qu’ils finissent par ennuyer les autres. Tout en imaginant des passerelles, qui existaient jadis, afin de leur permettre éventuellement de revenir dans le giron des études générales. La filière professionnelle doit cesser d’être la voiture-balai de l’école : y passer est aujourd’hui une sanction, elle doit être une opportunité. Dans cet esprit, il faut multiplier les formations en alternance, afin de faire connaître aux élèves les métiers réels, et faire accepter aux patrons (aux artisans, particulièrement) l’idée que ces élèves ne sont pas des délinquants en puissance.

    5 - Inutile de renforcer les horaires : il faut sans doute dégraisser, au contraire. Supprimer par exemple l’inutile enseignement de l’anglais en primaire. Aujourd’hui, des gosses saturés d’anglais macaronique n’entrent plus en cours de langue, en sixième, qu’à reculons. Supprimer au collège toutes les activités périphériques — ont-ils vraiment besoin d’apprendre à l’école à surfer sur Internet ou à manier le joystick ? Dans le même esprit, la classe de seconde « indifférenciée » cumule tous les programmes de toutes les disciplines — on arrive à plus de 35 heures de cours par semaine. C’est absurde, et démotivant. Les vraies spécialisations doivent intervenir le plus tard possible. Ce n’est pas en détruisant le tissu enseignant que l’on peut faire des économies, c’est en supprimant des programmes toute la mauvaise graisse pédagonigologique.

    6 - Côté discipline, il faut abroger les circulaires qui identifient les punitions à des « brimades » — et peut-être ne plus imposer à un établissement qui exclut définitivement un élève de lui trouver un autre établissement d’accueil, ce qui revient à faire circuler les trublions. Responsabilisons les parents — à eux de réinscrire leur voyou là où l’on voudra bien le prendre. On peut d’ailleurs inventer des écoles-relais, avec profs volontaires (et payés en conséquence), ou multiplier les internats, afin de décontextualiser des jeunes qui n’ont pas tous la chance d’être orphelins, comme disait Poil-de-carotte, et ne sortent du collège que pour mieux s’épanouir dans l’école de la rue. De même, il faut généraliser les règlements intérieurs intelligents (interdiction totale des portables, par exemple), et censurer les initiatives idiotes (l’interdiction des « colles » le mercredi, alors que c’est souvent le seul levier réel pour faire pression sur certains élèves). Et redonner aux enseignants la décision finale dans les conseils de classe (et non aux chefs d’établissement, qui en profitent pour soigner leurs statistiques). Non pour multiplier les redoublements, mais pour faire savoir aux élèves que le prof qu’ils sont tentés de chahuter aura son mot à dire, et que ce sera le dernier. Ça calme.

    7 - En primaire comme au collège, réinstaurer l’étude du soir, en la confiant aux enseignants-stagiaires, aux étudiants tentés par le métier. Ce serait une initiation intéressante. Dans le même esprit, revenir à une formation des enseignants basée sur le compagnonnage, et non sur des cours théoriques coupés de la réalité des classes. D’aucuns suggèrent d’ailleurs de nommer en collèges les spécialistes auto-proclamés des « sciences de l’éducation » qui pontifient aujourd’hui dans les IUFM, à cinquante kilomètres et quelques années-lumières des réalités de terrain.

    8 - La réforme du lycée est-elle bien utile ? Exemple-type d’interrogation rhétorique… En particulier, la suppression de l’histoire-géographie en terminale S (et son absence depuis des lustres dans les sections techniques) est une réforme strictement idéologique, inventée par des Grenelliens qui pensent, comme Big Brother, que « l’ignorance, c’est la force » (de même en sections techniques, d’où elle a disparu depuis vilaine lurette). Quant à « l’accompagnement personnalisé », c’est une fumisterie dans la plupart des cas. Et pour ce qui est de l’autonomie des établissements, il en faut certes assez pour qu’ils puissent faire face aux réalités du terrain (rien n’est jamais semblable), mais juste assez pour s’adapter sans négliger les fondamentaux (rien n’est vraiment différent).

    9 - Un primaire mieux organisé produira des collégiens mieux adaptés, qui deviendront des lycéens épanouis, et donneront des étudiants adaptés (aujourd’hui le taux d’échec en université frôle les 50%). Il faut donc sans doute réorganiser les deux ou trois premières années de fac sur le modèle généraliste des prépas (toute spécialisation précoce est un échec assuré), sans que cela amène à supprimer les vraies prépas : il y a place pour l’excellence, parce qu’il y a une demande d’excellence. De ces formations-là sortiront des enseignants (à L3 ou M1) capables de transmettre des connaissances solides, et, à M2 (oui, l’agrégation sert à quelque chose !) de vrais spécialistes de leur matière. Bref, inventer des instituts d’enseignement supérieur qui ouvrent à la fois sur l’université et la recherche, et sur les métiers à spectres larges. Inutile de s’obstiner à lancer des néo-bacheliers riches d’incompétences dans des études pointues alors qu’ils ne maîtrisent pas l’orthographe ou la chronologie. Dans cet esprit il est essentiel de multiplier les système-relais, à tous les niveaux, afin d’amener au plus haut de leurs possibilités des élèves capables mais noyés dans des établissements (ZEP ou non) où l’on n’a guère eu le loisir de faire parler leurs qualités. Des propédeutiques, de l’entrée en sixième à la première année de fac — cela limitera les redoublements, et allègera d’autant la facture finale : investir là où il faut permet de ne pas arroser indifféremment un système obsolète. N'importe quel jardinier vous expliquera que le goutte-à-goutte ciblé donne de meilleurs résultats que l'arrosage indistinct.

    10 - Affirmer haut et fort le caractère national, républicain et laïque de l’école. Ce n’est pas l’élève qui en est le centre, ce ne sont pas les « communautés » (un mot haïssable, contre lequel il faut s’insurger sans trêve) qui doivent y faire la loi, c’est la transmission des savoirs. Les enseignants doivent redevenir les passeurs de cette culture réelle et humaniste qui est le pivot de l’école. Le bac, même s’il est susceptible d’aménagements, doit être clairement revendiqué comme un examen national — peut-être examen de fin d’études, en laissant une plus grande souplesse aux universités pour recruter et orienter les étudiants qui aujourd’hui viennent se fracasser comme des moucherons affolés dans ces impasses que sont la psycho, la socio, la « communication » et autres attrape-nigauds. Les universités doivent d’ailleurs être sommées de dire, à l’inscription, quelles sont exactement les perspectives d’emploi de telle ou telle formation — et s’occuper activement de l’orientation de leurs étudiants. L’orientation est un souci à tous les niveaux, du collège à la fac, et c’est une chose trop sérieuse, comme aurait pu dire Clémenceau, pour la laisser aux COPSY, de plus en plus PSY, au détriment du reste (2).

    (1) Et non 38 et 22, comme l'affirme Chatel dans une récente interview
    (2) Questions cruciales que j'ai eu l'occasion de poser à Valérie Pécresse, ex-ministre des universités, dans un petit livre pratique qui sort ces jours-ci et intitulé
    Après le Bac / Mode d'emploi
    1 - Imposer fortement les cours privés du type Acadomia, qui prospèrent sur l’angoisse générée par tant de réformes inutiles et de désordre pédagogique. Accepter les parents comme « associés » — restons polis —, pas comme consommateurs de prestations. Enrôler de vrais spécialistes pour s’occuper des enfants handicapés, particulièrement au primaire. Revenir au système de mutations tel qu’il existait avant Claude Allègre — demander un poste précis, et avoir la possibilité de rester là où l’on était en cas d’impossibilité, sans se retrouver balancé sur un rectorat entier et deux ou trois établissements toujours à bonne distance les uns des autres.

    2 - Curieusement (est-ce si curieux ?) la question des revendications salariales n’est pas une priorité : quand elle apparaît, c’est de façon raisonnable. Une augmentation de 20 % des salaires serait bienvenue, mais chacun sait qu’on ne se lance pas dans ce métier pour être riche, mais au moins assez bien payé pour être, en ces temps où l’on confond l’être et l’avoir, socialement mieux reconnu. Cela permettrait en tout cas de faire revenir les hommes dans le métier — et d’éviter la perpétuation de stéréotypes qui font d’une profession fortement féminisée une profession forcément dévaluée. En tout cas, la réévaluation des salaires des enseignants débutants, si elle est en soi une excellente chose, se fait au détriment de ceux qui enseignent déjà depuis des années, et donc l'ancienneté et l'expertise ne trouvent soudain plus de traduction sur leur fiche de salaire. C'est l'ensemble d'une profession qu'il faut revaloriser. Et ce n'est pas en claironnant que les missions ont changé et qu'il faut impérativement que les profs séjournent 35 heures par semaine dans leurs établissements que l'on ramènera vers l'enseignement des étudiants qui aujourd'hui le fuient.

    3 - Last but not least : muter aux Eaux et Forêts les responsables de la prospective, ministériels ou rectoraux, afin qu’ils plantent des arbres pour compenser la déforestation occasionnée par leurs multiples circulaires.

    Retrouvez Jean-Paul Brighelli sur son blog. 

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  • 2010     298 p.    28 €

           L'intérêt de l'ouvrage de Sidiki Kaba est de mettre constamment en perspective certaines ambiguïtés de la justice pénale internationale, les ressorts politiques qui les sous-tendent inévitablement, et le caractère encore inachevé de l'édifice en cours. En évoquant les cas de Charles Taylor, de Saddam Hussein, de Pinochet et de Hissène Habré, Sidiki Kaba relate fort opportunément les calculs politiques qui ont entouré leurs procès, ou l'absence de procès en ce qui concerne l'ancien dirigeant tchadien. Le lecteur saisit sans mal la trame politique des procédures inachevées ou expéditives (Pinochet, Saddam Hussein et Hissène Habré) et des délocalisations sans raison, sinon politique, des procès (Charles Taylor). L'expérience acquise au cours des six années passées à la présidence de la principale organisation de défense des droits de l'homme, la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH), confère incontestablement à Sidiki Kaba l'autorité et la légitimité nécessaires pour formuler des suggestions destinées à consolider les fondations dans le domaine des droits civils et politiques, et à les étendre aux droits économiques et sociaux, voire écologiques. Pr Albert Bourgi.

     
          Sidiki Kaba est un juriste de renommée internationale qui a marqué de par son empreinte le traitement des grands dossiers en matière de droits de l'homme. Il occupa de nombreuses fonctions dont celle de président de la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme-FIDH (2001-2007).

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  • Le Forum Mondial de l’Eau : quelle place pour une alternative ? (11/01/12)

       En mars prochain, la Fondation France Libertés se mobilise pour le droit à l’eau dans le cadre du Forum Alternatif Mondial de l’Eau. Vous pourrez suivre nos actions à travers les newsletters des mois de janvier, février et mars. Mais d’abord, retour sur ce qu’est le Forum Mondial de l’Eau et son alternative le Forum Alternatif Mondial de l’Eau.

    Le Conseil Mondial de l’Eau a été créé en 1996. Composé d’ONG, d’instances publiques, d’entreprises privées, d’universités et d’instances financières telles que la Banque Mondiale, il regroupe aujourd’hui plus de 350 membres.

    L’un des temps fort du Conseil Mondial de l’Eau est le Forum Mondial de l’Eau organisé tous les trois ans depuis 1997. Le sixième Forum Mondial de l’Eau aura lieu du 12 au 17 mars 2012 à Marseille.

    A travers ces forums, le Conseil Mondial de l’Eau a pour objectifs de "mettre les problèmes de l’eau plus en avant sur la scène politique", de "formuler des propositions concrètes et souligner leur importance sur la scène internationale", et de "susciter un engagement politique" (site internet du CME).

    Ces objectifs sont louables. Pourtant un certain nombre de limites sont mises en avant par les militants à commencer par la place dominante des intérêts du secteur privé de l'eau dans les activités du CME.

    S’il se présente souvent comme une instance internationale reconnue, le statut du CME ne lui confère pourtant en aucun cas une telle légitimité. En effet, il est dénué de tout espace de débat avec la société civile et de négociation politique.

    Lles Forums Mondiaux pourraient donc plutôt être vus comme des "foires commerciales" pilotées par les fédérations d’entreprises privées qui y présentent leurs solutions pour favoriser l’accès à l’eau, tout en concidérant celle-ci comme une marchandise comme une autre, une ressource qui se vend, s'achète et avec laquelle il faut faire des bénéfices... Ces "solutions", qui seront au cœur du sixième FME, ne sont donc ni les solutions de tous, ni les solutions pour tous.

    Depuis le forum de La Haye en 2000, la société civile internationale organise des contre-forums afin de porter d'autres valeurs, de proposer d'autres solutions, de défendre le droit à l’eau et de refuser la privatisation de ce bien commun. En 2006, le Forum de Mexico a été marqué par une très forte mobilisation de la société civile : plus de 30 000 personnes étaient réunies pour proposer une alternative crédible au FME.

    Leader du marché de l’eau avec les multinationales Veolia et Suez Environnement, la France accueille cette année le Forum Mondial de l’Eau à Marseille en mars.

    Trois mois avant le Sommet de la Terre à Rio, pour montrer qu'il existe d'autres solutions à la marchandisation de ce bien commun de l'humanité, la société civile se mobilise et organise un Forum Alternatif Mondial de l'Eau (FAME) à Marseille du 9 au 17 mars.

    France Libertés s’y associe en organisant deux journées de coordination de la société civile sur la thématique "Eau, Planète et Peuples : pour une citoyenneté mondiale", les 9 et 10 mars au siège du Conseil régional Provence-Alpes-Côte-d’Azur.

    Coorganisées avec le CRID, la Coalition Eau et l’Effet Papillon, ces deux journées seront l’occasion d’engager un vrai débat entre les acteurs de la société civile internationale, afin de porter ensemble un message humaniste fort avant l’ouverture du FME. Retrouvez tous les détails sur notre site et dans notre prochaine newsletter dès le mois de février. 


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