• Les Chinois riches s'exilent

      L’exil des grandes fortunes chinoises

     

    La vague d’émigration des riches hommes d’affaires fait du bruit en Chine. Le Nanfang Zhoumo dresse le portrait de ceux qu’on appelle les « businessmen nus ». De notre partenaire Chine Plus.

     

    l y a quelques mois, la presse chinoise avait abondamment commenté le cas des « cadres nus » 裸官– ces hauts fonctionnaires « restés seuls en Chine après avoir envoyé leur famille et leur argent à l’étranger » comme l’explique une revue de presse du site Question Chine –, un autre phénomène défraie aujourd’hui la chronique : celui des « businessmen nus » 裸商.

    Pour son enquête spéciale qui fait les gros titres de l’édition de cette semaine, le Nanfang Zhoumo est allé à la rencontre de ces « businessmen nus ». Ma Hao, 41 ans, correspond bien au portrait type du "businessman nu" : « 35-45 ans et dont la fortune s’élève à 10, jusqu’à 40 millions de yuans ». Il confie au journal du Sud que dans les soirées huppées les conversations finissent invariablement par dériver sur le sujet de l’expatriation. Une enquête du Hurun Rapport – organisation qui publie un classement annuel « de référence » des grandes fortunes chinoises, citée par The Economist , semble confirmer l’importance de cette tendance. D’après les données recueillies dans le rapport 2012, sur les 63 500 Chinois ou Chinoises possédant une fortune personnelle supérieure à 10 millions de yuans (1,22 million d’euros), plus de 16 % ont déjà émigré et 44 % « envisagent de le faire dans un avenir proche ».

    LA POLITIQUE CHINOISE N'EST « PAS ASSEZ STABLE »

    Le Nanfang Zhoumo affirme que cette « vague » - la troisième que connaît la Chine depuis le début des réformes instaurées par Deng Xiaoping - a commencé en 2010. Depuis, de nombreux chercheurs affirment que l’émergence des « businessmen nus » ne représente pas seulement une perte de capital, mais risque également de provoquer des problèmes sociaux et financiers. Ces hommes d’affaires se serviraient en effet de leurs entreprises pour obtenir des hypothèques et des prêts de la part des banques avant de transférer leur argent à l’étranger et se déclarer « en faillite » en Chine.

    Face à cette avalanche de critiques, Ma Hao qui possède un passeport néozélandais et gère deux sociétés et une dizaine d’appartements à Shanghai tente de se défendre : « Il ne faut pas croire que les riches qui émigrent sont coupables. C’est juste que notre aisance financière nous donne plus de possibilités. » Il affirme que la raison principale qui l’a poussé à s’expatrier est « d’offrir une meilleure enfance à son fils », c’est-à-dire un système scolaire moins strict et dans un meilleur environnement que celui de sa ville natale. Ce motif est largement invoqué parmi les riches expatriés chinois. Selon le Hurun Rapport, 58 % d’entre eux ont cité l’éducation de leurs enfants comme première cause d’expatriation, le désir de sécuriser leurs biens arrive en deuxième position avec 43 %.

    FUIR AVEC L’ARGENT QUAND L’ÉCONOMIE IRA MAL

    « La politique chinoise est instable », se plaignent Ma Hao et ses amis lors de leurs soirées. Ils trouvent que les entreprises privées sont bien moins avantagées que les entreprises publiques. Ma Hao rapporte que, récemment, il entend de plus en plus parler de « levées d’impôts soudaines » à travers le pays. « Les préoccupations au sujet de la sécurité de leurs biens voire de leur propre personne expliquent les départs des entrepreneurs {fortunés}», écrit le journaliste du Nanfang Zhoumo. Les mauvaises prévisions de la croissance chinoise (lire notre article : La Chine en chute (libre) ?) sont également un facteur d’inquiétude pour ces businessmen. « C’est un sujet tabou, mais dont on parle souvent dans certains milieux : comment fuir à l’étranger en emportant l’argent quand l’économie chinoise ira mal », poursuit le journaliste.

    L’investissement personnel direct à l’étranger étant toujours interdit en Chine, faire sortir l’argent du pays pour investir n’est pas chose aisée, explique le Nanfang Zhoumo. Plusieurs de ces businessmen utilisent des sociétés-écrans ou, plus fréquemment, le service de « banques souterraines » pour arriver à leurs fins.

    Cependant, nombreux sont ceux qui ne désirent pas forcément rejoindre leur famille à l’étranger. Li Yuan, un homme d’affaires de Wenzhou dont les parents sont installés au Canada depuis 2005 déclare : « Nous ne pouvons pas quitter la Chine. Où pourrait-on trouver au Canada un business qui rapporte un profit de 15 % par an ? En Chine, on peut. » D’après le journaliste du Nanfang Zhoumo, l’idée que les émigrants emporteraient toute la richesse de la Chine dans leur bagage serait à nuancer. D’après les chiffres fournis par l’association des agences d’immigration à Pékin, 94 % de la richesse des émigrants se trouverait encore en Chine.

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