• Prévention des risques industriels

     

    Prévention des risques industriels : un bilan mitigé

    Publié le 16-07-2012

     


    En 2011, 926 accidents impliquant des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) ont été répertoriés en France. Une loi de 2003, la loi Bachelot, impose cependant des règles de protection des riverains, qui concernent 9 millions de personnes. Mais celle-ci peine à s'appliquer. Explications avec Yves Blein, maire de Feyzin et député PS du Rhône, président d'Amaris, l'association nationale des communes pour la maîtrise des risques technologiques majeurs.

    Novethic. Où en est l’application de la loi Bachelot ? L’année dernière, à l’occasion des 10 ans d’AZF, l’accident qui avait initié cette loi, vous présentiez un bilan plus que mitigé (voir article lié). Cela a-t-il avancé ?  
    Yves Blein. 
    Il y a une progression dans la mise en place des plans de prévention des risques technologiques, du moins en volume avec un peu plus de 400 PPRT adoptés (environ 35 % du total contre un objectif initial de 70% fin 2012, ndlr) mais les plus délicats ne sont pas encore prescrits. Lors du colloque du 5 juillet (« quelle place pour le risque technologique dans la ville du XXIème siècle ? »), nous avons aussi pu vérifier que les méthodes de prévention et les standards de protection contre les risques industriels étaient plus ou moins équivalents en Europe.
    En revanche, nous restons toujours très attentifs à la question des crédits d’impôts pour aider les riverains à réaliser les travaux d’aménagement de leur habitation dans le cadre des PPRT. Depuis l’an dernier, le texte a été un peu amélioré dans la loi de finance 2011 puisque l’Etat a remonté à 30% sa contribution. Mais nous sommes encore loin du compte par rapport à ce qui avait été défini dans la loi Grenelle 2. Nous allons donc revenir à la charge.

    Le nouveau gouvernement vous semble-t-il être attentif à cette question ? 
    Yves Blein.
     Lorsque nous avons plaidé notre cause auprès des différents partis lors des dernières élections, le parti socialiste a bien relayé la question, notamment sur la problématique des riverains. Nous avions notamment beaucoup travaillé avec l’ancienne rapporteuse du budget au sénat, Madame Bricq qui connaît bien le sujet mais aussi avec la commission finance de l’assemblée nationale, donc ce n’est pas un sujet qui leur est inconnu. J’ai bon espoir d’avoir une écoute attentive, mais le contexte budgétaire actuel ne nous permettra sans doute pas d’obtenir tout ce que nous souhaitons…

    Début juin, des PME ont déposé un recours administratif contre le PPRT de Sisteron au motif qu’elles doivent supporter seules d’importants travaux de protection de leurs bâtiments…
    Yves Blein.
     C’est un sujet qui nous inquiète énormément car leur sort n’a pas été pris en compte par la loi. La réglementation prise sous le coup du traumatisme de l’accident d’AZF a sans doute été trop rapidement conçue à cet égard : elle a été conçue pour protéger les riverains sans tenir compte de la présence de nombreuses entreprises dans ces périmètres. Or il y a un risque de disparition de certaines petites entreprises qui sont dans la zone classée à risque mais qui n’ont rien à voir avec les installations industrielles, qui génèrent la mise en place d’une zone de protection. Il y a effectivement ces entreprises de Sisteron* qui ont demandé l’annulation du PPRT, mais d’autres sont en grave difficulté à Toulouse par exemple et dans ma ville, à Feyzin, c’est un fabricant de meubles qui risque d’être déplacée. 
    Le problème vient du fait qu’on leur impose les mêmes exigences de protection que les riverains, mais sans aucune prise en charge comme le crédit d’impôt. Plus de 10 000 entreprises sont concernées, avec un coût total de travaux estimé à 1,5 milliard d’euros.
    Nous demandons donc un traitement adapté pour ces entreprises, pour leur permettre de protéger et de former leur personnel mais ne pas leur créer de nouvelles contraintes de renforcement du bâti disproportionnées qui sont trop lourdes pour elles et qui menacent leur survie.

    Justement dans un contexte de désindustrialisation, comment réagissent les élus face au risque industriel ? 
    Yves Blein.
     Ce qui est clair, c’est qu’il y a une forte volonté des élus de conserver et d’encourager le développement des entreprises sur les territoires, car elles représentent une richesse fiscale et une source d’emplois indispensable. Il n’y a donc pas de remise en cause des installations industrielles. Mais il faut que cela soit compatible avec une forte protection des riverains. Et avec le développement des autres entreprises qui sont situées sur les territoires visés par les PPRT. 

    *Selon le quotidien La Provence du 4 juin, des entreprises riveraines (Citroën, Point P et Mercedes) du groupe Sanofi à Sisteron (Alpes de Haute Provence) ont déposé en février un recours devant le tribunal administratif de Marseille pour éviter « de payer les lourds travaux » de protection imposés par Le PPRT et demander l’annulation de celui-ci. Certains vont jusqu’à 180 000 euros, « sans garantie de protection », dénoncent les plaignants.

    Propos recueillis par Béatrice Héraud 
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